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l se sera écoulé un long moment entre les deuxième et troisième tomes de La mémoire dans les poches. Dans cet ultime album, Laurent poursuit son enquête pour retrouver son père, lequel s’est mystérieusement enfui avec l’enfant d’une jeune Algérienne. Sa quête l’amène à redécouvrir une personne dont la biographie diffère de celle qu’on lui a exposé. Ses recherches le conduiront dans l’est de la France où il entrevoit les véritables origines du septuagénaire, mais également son legs.
Le récit, signé Luc Brunschwig, est habilement construit. Les strates se superposant, le lecteur est invité à recomposer une existence fragmentée. Certaines portions sont appréciées à travers les yeux du vieil homme, d’autres avec ceux de son garçon, sans oublier le regard des nombreux témoins qui l’ont côtoyé. La démarche a une allure journalistique, elle est d’ailleurs suivie, caméra au poing, par Marion qui tourne un film sur le destin d’un individu pas aussi ordinaire qu’on le croyait. Les trames narratives, à savoir l’enlèvement du gamin et l’enfance du protagoniste finissent se télescoper ou du moins par afficher des similitudes révélatrices. Avec adresse, le dramaturge fait converger les deux histoires. Il s’amuse alors à juxtaposer des scènes pour se jouer du bédéphile, par exemple lorsque le fils sonne à la porte et qu’à la case suivante l'action se passe au même endroit, quelques années plus tôt.
Le scénario, tout en nuance et en subtilité, est épaulé par un dessin exposant les mêmes caractéristiques. Pas d’excès de style pour raconter les petites gens. Le héros a un gros nez et peut ainsi être aisément identifiable à toutes les étapes de sa vie. Le découpage est varié, mais sans affectation. Étienne Le Roux, qui assure aussi la mise en couleur, utilise essentiellement le marron et le vert, et privilégie des teintes généralement foncées. L’artiste crée de cette façon un climat de calme et de douceur, qui contraste avec les événements dramatiques.
Une saga familiale aux rebondissements multiples. Une conclusion étonnante et de grande qualité pour ce récit entamé il y a plus de dix ans.
Chef d’œuvre ! Une série de très très grande qualité. Réellement indispensable. L’ensemble est excellent. Dessins, scénario, mise en forme. Dévorer chez moi par l’ensemble de la famille avec le même plaisir. Seul bémol, la relecture ! L’histoire est tellement marquante qu’il faudra attendre très longtemps pour s’y replonger.
Un album qui nous attendions tous, et qui clôture brillamment la série. Bien que le temps ait passé, le dessin et l'histoire des trois tomes s'enchainent bien, avec chacun son héros qui ressort: la mère, l'enfant et le père. 3 personnages et 3 histoires au sein d'une même saga.
Le dessin est en harmonie avec l'histoire, suffisamment détaillé et recherché, mais rien de trop, une réalisme simple.
Excellent final !!!
Brunschwig impose son retour après avoir vaincu ses démons,
Les dessins de Le Roux sont irréprochables comme d'habitude.
Les personnages sont construits et détaillés en profondeur, c'est la marque des grands auteurs.
Une chute difficile et des plus éprouvante avec ce 3ème album qui renvoie aux horreurs de la 2nd guerre mondiale et qui conclue de façon magistrale ce magnifique triptyque. Un scénario bouleversant et des personnages profondément humains parfaitement mis en scène par des dessins au diapason de cette triste épopée.
Bravo et merci messieurs les auteurs, vous nous avez offert un chef-d’œuvre !
Voilà, ça y est la dernière pièce du puzzle est mise. Je viens de finir de lire le troisième tome de « La mémoire dans les poches ». Et je ne suis vraiment pas déçu ! Mais revenons au début.
Comme à mon habitude, quand je lis une série au fil de son écriture, je relis les livres précédents à chaque nouveau tome. Cela me permet de me remettre dans l’ambiance et aussi de me remémorer l’intégralité de l’histoire. Dans le cas présent, cela m’a aussi permis de revivre la richesse des deux tomes sortis et lus il y a presque 10 ans.
Les personnages principaux, Sidoine, Laurent et Rosalie Letignal, sont magnifiquement dépeints. J’ai progressé avec eux, leur humanisme sans caricature, leurs sentiments sans complaisance. Tout cela a fait que je me suis progressivement projeté en eux, surtout en Laurent et un peu en Sidoine aussi. Les personnages secondaires, qui étayent le récit, permettent de ne pas perdre le fil. Fil qui peut paraître complexe à la première lecture, mais qui permet de garder le suspens jusqu’au bout et de prendre plaisir à découvrir de nouveaux détails à chaque relecture. Je vais d’ailleurs pour cela garder les trois tomes sur ma table de nuit pour les relire dans un mois.
Dans ce tome 3, les questions trouvent progressivement des réponses, satisfaisantes ou pas. Il faut bien suivre car l’histoire s’accélère. On rencontre le passé de Sidoine. Pas de « Deus ex machina » ou de coup de théâtre. La suite logique de ce qui commençait à s’annoncer dans les tomes précédents. La surprise est pour Laurent et Rosalie. Je pense que des lecteurs qui auraient vécu une situation similaire pourrait y décrypter des sentiments qui m’échappent.
Et puis il y a la scène qui commence à la page 66 et se termine page 73 ! Elle est amenée, magistralement et sans prévenir par un flash-back pages 63 à 65. Sans dévoiler ce qui s’y passe, il y a là une scène fortement chargée en émotion. Surtout si elle évoque chez le lecteur des instants de tristesse et de douleurs. Ce qui est mon cas. Il se passe beaucoup de choses dans cette grange. La mort, la mémoire, le sursaut de vie, l’enfance et sa vérité, la présence des proches et sûrement bien d’autres choses que chacun verra selon sa propre expérience ou au fil des relectures. Tout s’entremêle entre le vécu et le souhaité, ce qui est passé et sur lequel on ne pourra pas revenir. Les regrets et la résilience... La force de cette scène, pour moi, est que chacun y pioche et y apporte ce qu’il veut tellement elle est bien écrite. Les détails sont importants : le rôle de Laurent, le sursaut de Sidoine, la présence de Tarik, l’absence de Rosalie… Tout y est ! Cette scène m’émeut au larme rien que de l’évoquer.
La page 73 reste encore un mystère pour moi. La tension entre la veste et les accords des participes passés donne des indices. Lili, Laurent, … ? Une incitation à la relecture. Mais elle reste aussi un « mystère » au sens religieux du terme : celui de la mort. Qu’a-t-il vu lors de son dernier souffle ? Je n’étais pas là… Je ne saurai jamais.
J’ai toujours un peu de tristesse quand une histoire se termine. Surtout quand on a eu le temps d’imaginer ses fins possibles. Là, je ne suis pas déçu du tout. Ce n’est ni une fin en suspens, ni un « tout est bien qui finit bien ». Un entre les deux qui correspond à la vie. Comme toute l’histoire. En fermant le livre, j’ai cette impression de laisser les personnages poursuivre leur vie, de laisser des amis, des voisins.
Je n’ai pas parlé de la qualité du dessin. Ils sont vraiment en accord avec l’histoire. Les ambiances sont placées avec justesse. Les couleurs sont splendides et les personnages humains.
Voilà, une histoire qui restera dans mes lectures régulières, tout comme Le Bar du Vieux Français et Blast pour ne citer qu’eux.