C
ertains endroits favorisent les confidences. Pourquoi pas le green de Grande-Rivière, se dit Stéphane. Il propose à son paternel, passionné de golf, de taper quelques balles, au calme. Rien de tel qu'un tour sur le gazon pour se retrouver. Une excuse finalement, car cette journée à priori banale se révélera certainement l'une des plus intenses et riches de leur existence.
Fortement inspiré par sa propre histoire, Paul Bordeleau (Faüne) livre ici un récit empreint de délicatesse et d'humanité. Deux hommes, unis par le sang, ont vécu de nombreuses années ensemble, mais sans jamais vraiment se connaître. Par certains aspects, les personnages s'opposent : le plus âgé veut aller de l'avant, le plus jeune aimerait approfondir un passé méconnu et mieux appréhender les facettes d'un parent qu'il admire. Les deux se rejoignent, complices dans le souhait de sincérité, indispensable pour des liens authentiques. Le sport n'est qu'un contexte, qu'un prétexte à ce moment privilégié. Le lecteur est invité dans l'intimité d'une famille qui, comme toutes les autres, possède son lot de tragédies et de zones d'ombre. La justesse du propos et la pudeur avec laquelle les sujets sont abordés (disparition d'un frère, retraite précipitée, maladie) touchent profondément. La lenteur étudiée est indispensable pour laisser les émotions éclore et les confidences fleurir. Des petits moments d'humour jalonnent le parcours, apportant de la légèreté. Sans oublier les expressions québécoises, toujours aussi savoureuses.
Le trait de l'auteur, semi caricatural, fait penser à Monsieur Jean. Très proche du crayonné, le rendu est relativement doux et expressif. Les décors aux formes simples possèdent un aspect naïf et épuré, laissant les pensées libres de toutes contraintes visuelles. Par les plans et les angles de vue variés, la monotonie inhérente au milieu est balayée. Les jolis camaïeux de couleurs à l'aquarelle sont en accord avec les sentiments évoqués, un peu de tension, de nostalgie, d'amertume ou de tendresse.
Des retrouvailles entre deux générations, un swing qui frappe au cœur. À la fois léger et grave, Le septième vert remue. C'est bijou.
C'est un album d'ambiance qui n'est pas mauvais mais une partie de golf entre père et fils n'est pas ma tasse de thé. Certes, cette partie sera l'occasion idéale de faire le point sur la mort du petit frère il y a 20 ans ou encore sur l'ancien emploi du père au centre de recherche. C'est vrai qu'il n'y a rien de mieux qu'une petite partie de golf pour régler tout ces problèmes et non-dits familiaux.
Oui, vous aurez compris que c'est pour ceux que cela intéresse et il y en a toujours. Moi, j'avoue que ce fut d'un ennui presque mortel. Pour autant, je reconnais une jolie mise en forme autour assez feutré de ce terrain de golf. On peut y voir les biches reprendre gout à la vie. On pourra dire que c'est plus qu'une partie de golf: c'est la vie.