Paroles de taulards est un album qui ne laisse pas indifférent. A l’origine du projet, on trouve l’association Bd Boum, organisatrice du festival de Blois. Deux de ses membres sont allés à la rencontre de six détenus de la maison d’arrêt. De ces échanges sont nées des histoires courtes, comme autant de témoignages de l’intérieur, bruts, sans concessions, et surtout sans censure. Corbeyran est intervenu dans le projet pour mettre en scène ces tranches de vie en collaboration avec leurs auteurs. Enfin, les dessinateurs, conquis par cette réalisation, ont eu la difficile tâche d’illustrer ces maux.
L’initiative est louable et dépasse le simple divertissement que l’on attribue généralement à la bande dessinée. Il s’agit d’une petite ouverture sur cet univers carcéral, si fermé, si opaque, empreint des fantasmes de notre société, et rempli de préjugés. « S’ils sont là, c’est qu’ils le méritent ». La phrase est sans appel, condamnant du coup les erreurs de jeunesse, les failles de la vie. Bien sûr, certains purgent une peine correspondant parfaitement à leurs actes, mais cela ne leur enlève pas pour autant le droit d’exister en tant que personnes.
Les différents récits présentés sont profondément humains, d’une grande richesse et véhiculant une certaine émotion. L'anecdote de cet ancien taulard remercié pour son honnêteté après avoir aidé une jeune femme victime d'une agression en est un parfait exemple. Le style de chaque dessinateur donne une grande force à chaque histoire. Marc-Antoine Mathieu illustre l'arrivée d'un homme dans sa cellule et le changement de peau qui s'opère avec un trait où la hauteur donnée aux murs est oppressante. Des auteurs connus (Davodeau, Guérineau, Crespin ou encore Baudouin) côtoient d’autres qui le sont moins (Régis Lejonc, Matthys, Christopher…) conjuguant ainsi leurs talents pour notre plus grand plaisir.
Malgré une couverture dure et peu engageante, cet album mérite que l’on s’y attarde. Parfaitement adapté à cette collection Encrages chez Delcourt, cette initiative a été poursuivie avec Paroles de Taules et Paroles de Parloirs.
Corbeyran nous livre 25 histoires fortes et humaines qui laissent entrer dans le monde obscur de la prison un peu de cette lumière qui aide à comprendre. Il y avait eu auparavant Paroles de taulards qui avait rencontré un certain succès d'estime. C'est une oeuvre qui donne la parole à ces exclus de la société.
Les journées sont longues en prison et ce n'est pas une sinécure. L'opinion publique a tendance en général à trouver les prisons trop confortables. On jette encore du mépris sur des prisonniers dont les conditions de vie se dégradent en raison de la surpopulation carcérale. Si l'incarcération reste une punition, l'objectif est quand même de trouver une vraie réinsertion en faisant réveiller les consciences sur les véritables valeurs du monde qui nous entoure.
Paroles de taule nous donne la version des prisonniers sur les différents problèmes rencontrés sur les lieux de détention. Cependant, il est également fait une place aux gardiens qui vivent chaque jour la prison alors que ce n'était pas forcément voulu ou choisi et qui font un métier difficile.
J'ai trouvé l'ensemble d'une grande honnêteté intellectuelle. Certains témoignages peuvent briser le coeur. J'aimerais tellement que chaque personne puisse prendre conscience de ce qui se passe vraiment en prison. Toute cette souffrance est parfois atroce.