Astronauts in trouble présente les trois étapes d’une conquête spatiale fictive. L’aventure commence dans le nord du Pérou à la fin des années 1950. Dans une base secrète, l’armée américaine planifie l’envoi d’un homme sur la Lune. Un espion soviétique s’en mêle et c’est le chaos. Le colonel Lloyd Macadam réussit tout de même à s’envoler et à se poser sur le satellite naturel. Les journalistes de Chanel 7 ont tout vu, mais sont sommés de garder le silence. Cinquante ans après le voyage de Neil Armstrong et de Buzz Aldrin, Ishmael Hayes, un milliardaire fou, invite une équipe de reporters de la même station de télévision à découvrir la colonie qu’il a discrètement établie sur l’astre. Quelques dizaines de pionniers y vivent déjà en autarcie. Sous l’œil des caméras, il se déclare propriétaire des lieux. La Terre lui fera entendre raison à coups de missiles. Enfin, dix ans plus tard, accoudés à un bar lunaire, un groupe de personnes se souviennent du mégalomane. À l'écran, le bulletin de nouvelles est diffusé depuis un aéronef en orbite géostationnaire au-dessus de la Californie.
La singularité de ce scénario signé Larry Young est d’opposer, à chacune des trois époques, les pouvoirs militaire, politique, financier et médiatique. Les protagonistes changent, mais les intérêts qu’ils représentent demeurent. Cependant, malgré l’unité des thématiques, des enjeux et des forces en présence, l’uchronie est un peu décousue et les liens entre les trois parties sont ténus. Dans les faits, ce sont des récits presque distincts, même si le dernier fait une large place aux souvenirs de l'aberrante tentative de prise de possession. Le fait de ne faire pratiquement aucune allusion aux six missions Apollo qui ont aluni peut être regretté.
Rien à redire sur le dessin. Charlie Adlard est un vieux routier du comic (Walking dead, Batman, X-Files, etc.) et Matt Smith, quoique moins expérimenté, tire également son épingle du jeu. Leurs styles s’harmonisent bien et tous deux sont habiles pour représenter la tension et les scènes d’action avec tout ce qu’il faut de gros plans, de changements d’angles et de variations de cadrages. Ils maîtrisent bien le noir et blanc, leurs traits fins, souvent en opposition à des masses sombres, accentuent adroitement le drame. Mentionnons enfin de sympathiques clins d'œil, notamment au Voyage dans la Lune de Georges Méliès, mais surtout à On a marché sur la Lune d'Hergé, alors que la combinaison de l’astronaute de la première époque est de toute évidence inspirée par celles portées par Tintin et ses camarades en 1954.
Ce album comporte plusieurs bonnes idées ; ne manque qu’une ligne directrice plus solide pour que ce soit parfait.
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