L
es montagnes givrées au nord du Japon sont majestueuses. Elles défilent sous le regard de Shimamura qui les contemple depuis son siège de train et se souvient... sa première venue dans cette région de sources chaudes, six mois auparavant. Marié, père de deux enfants et rentier oisif, il vit à Tokyo. Mais quelque chose, ou plutôt quelqu'un, le pousse à revenir dans ce petit village : Komako, la jeune geisha insaisissable, énigmatique et tellement désirable. À l'arrivée en gare, il est soudainement tiré de ses pensées par une autre adolescente, Yôko. Celle-ci démontre beaucoup d'attention et d'affection à la personne mal en point à ses côtés. Un jeu de relations, simple et complexe à la fois, va progressivement se mettre en place.
Yasunari Kawabata est considéré comme l'un des plus grands écrivains nippons du vingtième siècle et Pays de neige, écrite dans les années trente, comme une œuvre majeure. Trois personnages principaux, une intrigue banale et pourtant... Itsugi Sakuko, habitué des récits romantiques, respecte rigoureusement le texte dans cette adaptation. Le choix est judicieux, car la beauté de la prose est l'atout indéniable avec la force des métaphores, le contraste entre le tumulte des sentiments et le silence de la neige qui devient un protagoniste à part entière. Il est question d'amour bien sûr, de passion, de doute. Il ne se passe pas grand-chose dans cette histoire, mais l'envoûtement est puissant. Le lecteur suit les subtiles interactions entre les héros, les revirements sentimentaux, les petits riens dont se nourrissent leurs rapports et tente de déchiffrer les non-dits (typiquement japonais !).
Le graphisme typé shôjo est fin, le trait élégant. Une représentation pudique des scènes d'amour permet de ne pas entacher la pureté de la poésie du roman. Les décors, peu abondants, sont détaillés, ainsi que les costumes. Les cases s'attardant sur les visages sont nombreuses, la posture des corps et les regards participent à la suggestion des émotions.
Une fin brutale et déroutante conclut ce manga d'atmosphère au phrasé et au dessin délicat ; il faudra accepter de ne pas saisir entièrement les liens ambigus. "Le cœur a ses raisons"..., une part de mystère reste en suspens, comme ces flocons qui volettent doucement dans l'air en l'absence de vent.
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