Les premiers aviateurs présente les aventures d’un quintette de pionniers de l’aéronautique : Besnier le serrurier (1678), Hiram Maxim (1894), Charles et Émile Pathé (1899), Orville et Wilbur Wright (1903) ainsi que Franz Reichelt (1912). Ces hommes ont une chose en commun : le désir de voler. La loi de la gravité étant cependant cruelle, le livre aurait pu s’intituler : L’art de la chute. Chacune des planches se conclut en effet par une chute, aux sens propre et figuré.
Journaliste culturel devenu prolifique scénariste de bandes dessinées (Pinkerton, Les cousines vampires), Alexandre Fontaine Rousseau signe ici un ouvrage atypique. Bien qu’il ne tienne pas le pinceau, c’est tout comme. Francis Desharnais (Burquette, Les chroniques d’une fille indigne) lui a fourni une vingtaine de petites vignettes et c’est à partir de ce matériau que l’écrivain construit ses histoires. Les illustrations étant (presque) immuables, tout se passe dans les monologues, toujours amusants, parfois franchement drôles. L’auteur ne cherche pas à remplir le vide graphique. Bien au contraire. Ses planches sont d’ailleurs fréquemment ponctuées de cases sans texte et le silence renforce la tension ressentie par le téméraire prêt à se lancer du haut d’une falaise, de la tour Eiffel… ou d’un banc.
Dans cette entreprise d’inspiration oubapienne, le rôle de l’artiste est discret. Deux dizaines de dessins, disposés dans un gaufrier de dix vignettes horizontales. Le point de vue est toujours très éloigné du sujet ; dans ces plans d’ensemble, l’engin volant, le protagoniste et son public ne sont que des évocations. Le trait, très fin, n’est soutenu par aucune couleur, ombrage ou autre artifice. Bref, c’est un faire-valoir pour le texte. Francis Desharnais renoue ici avec son projet précédent La guerre des arts, une amusante histoire d’extra-terrestres qui kidnappent créateurs et plombiers (et laissent ainsi un grand vide chez Ikea qui n’arrive plus à renouveler son offre de décors de cuisines). Ce récit repose lui aussi sur des itérations réalisées à partir d’un nombre très restreint d’images.
Une proposition originale et audacieuse qui permet surtout de mettre l’écrivain en valeur.
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