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ue Mère Vertu est vilaine ! Pourtant, derrière ce visage ingrat se cachent un cœur d'or et des doigts de fée. Les habitants n'hésitent pas à solliciter sa magie et ses soins pour les soulager de leurs maux. À l'écart du village, sa petite maison lui procure le calme dont elle a besoin. Cependant une chose lui manque : elle a beau être entourée d'enfants, elle-même n'en a pas. Un soir de solitude, elle exprime à haute voix son désir de maternité. Les paroles seront entendues par un démon, Injure. Il exaucera son vœu mais à quel prix ? L'enfant, Honte, aura un destin que personne n'aurait prédit.
Plus connu comme coloriste, Lovern Kindzierski s'exerce en tant que scénariste pour cette trilogie, inventant un monde à la fois enchanteur et gothique, traditionnel et surprenant. Il joue beaucoup sur les oppositions : le beau et le laid, le Bien et le Mal, n'hésitant pas à travestir la morale en faisant interagir des valeurs personnifiées dans un scénario intelligent et subtil. Les trois parties adoptent une thématique différente, tout en faisant évoluer l'intrigue vers un dénouement inattendu.
Le graphisme de John Bolton est superbe, il a un trait relativement varié : fin ou épais, grossier ou délicat, réaliste ou délirant. Il crée ainsi un univers original qui permet de caractériser les différentes forces en présence, la nature des êtres impliqués. Les couleurs à l'aquarelle participent énormément à l'ambiance, le blanc et le noir intervenant régulièrement dans le jeu des ombres et lumières. Les personnages féminins dégagent une sensualité sans vulgarité, un charme naturel. Les créatures démoniaques, quant à elles, ont des allures biomécaniques à la Alien.
Dans ce conte pour adulte, les auteurs revisitent un genre où le merveilleux peut être sombre et le maléfique innocent. La trame faussement classique entraîne le lecteur dans un tourbillon esthétique envoûtant, qui le laissera longtemps rêveur.
C'est très spécial, cette bande dessinée est pleine de pages fluides et agréables, des qualités et des défauts personnifiés, des textes avec des rimes, des couleurs claires et gaies en tout temps, une mode de la méchanceté créée, pertinente et réussie surtout. Qu'elle est belle Shame dans sa méchanceté. On en voudrait.
Pour moi, le but de l'auteur reste encore un peu obscure et compliqué, mais c'est une belle BD. J'espère qu'elle trouvera son public.. Les dryades et les nymphes ont trop vite été enlaidies par Shame (Honte). Un grand potentiel exite pour des suites plus belles, plus profondes. S'il vous plaît Monsieur Bolton, laissez la beauté aux femmes parce que vous y arrivez bien.