F
rance, 1940. Videgrain, estafette au 11e régiment, est séparé de son détachement. Perdu au milieu de la Débâcle, il erre à la recherche de son unité sur des routes encombrées de colonnes de civils fuyant l’avancée allemande. Cette fois, c’est la guerre, la vraie.
Plus de vingt-cinq ans après Exode, Pascal Rabaté rejoue la Drôle de Guerre dans La déconfiture. Le refrain est bien connu : face à la Blitzkrieg de la Wehrmacht, les forces françaises, aussi mal équipées que préparées, se font balayer en quelques semaines. Entre Robert Lamoureux et Jean Aurel, l’auteur du Linge sale dresse un portrait mi-amusé, mi-consterné d’une nation en pleine déroute. En bon conscrit, Videgrain tente de remplir son devoir du mieux possible, alors qu’autour de lui tout semble s’écrouler. Au fil de ses pérégrinations, il croise des soldats tout aussi perdus – géographiquement et moralement - que lui, des fuyards surchargés et pas mal de désolation.
À la limite d’un absurde digne de Samuel Beckett, les rencontres et les dialogues sont savoureux et toujours très réalistes. Le scénariste s’est documenté et ça se voit, sans heureusement, tomber dans le didactisme. Rabaté ne refait pas l’Histoire, à la place, il raconte et montre quelques individus égarés dans le chaos qui se remontent les manches pour faire ce qu’ils pensent juste.
Graphiquement, le dessinateur a choisi un style simple et d’une grande légèreté. Pas d’excès ou de fureur dans la mise en scène ni le découpage, tous les évènements – y compris les cadavres jonchant les bas-côtés - sont dépeints d’une seule et même manière très humaine, au travers des yeux du héros. Cette vision frontale et distanciée se révèle particulièrement efficace de par sa franchise. En effet, en évitant les effets de manche, l’artiste réussit à faire ressortir au grand jour les émotions de ses personnages, tout en mettant le lecteur face aux siennes : « Et nous, qu’aurions-nous fait alors ? »
Excellente relecture d’un épisode peu glorieux, La déconfiture pique là où ça fait mal et s’amuse quand il le faut. Suite et fin dans le deuxième tome.
Ce n'est guère un épisode glorieux de l'Histoire de notre pays. Après avoir envoyé des millions d'hommes à la boucherie lors de la Première Guerre Mondiale, voilà encore l'incompétence de l'état major durant ce qu'on a appelé la drôle de guerre. Neuf mois sans tirer un coup de feu puis la blitzkrieg qui fut rapide et efficace mettant à genoux un pays tout entier qui n'était manifestement pas préparé. La déconfiture nous donne plein de détails assez intéressants pour peu qu'on soit un peu masochiste. Pour autant, le ton sonne juste.
L'auteur choisit l'angle de deux militaires totalement impuissants dans ce chaos sans nom et qui tentent de survivre. Il y a certes l'absurdité de la guerre mais on l'a fait au nom des idéaux, pour ne pas laisser par exemple s'installer la tyrannie ou l'extermination au nom de la discrimination assumée. La sobriété du trait sera de mise. En ce qui me concerne, l'envie ne suit pas malgré l'honnêteté de ce travail.
La déroute française de juin 40 vue par un biffin lambda parmi des milliers d’autres.
Un récit écrit à hauteur d’homme, d’autant plus frappant qu’il est simple, épuré, laissant tout sensationnalisme de côté. Comment mieux décrire la défaite qu’en illustrant cette déconfiture avec l’économie dont fait preuve Rabaté ? Un décor quasi unique et bien documenté, des anecdotes, un rythme imprévisible, un trait juste et réaliste : la guerre comme si vous y étiez. Très bel album.
Brillant.
Un soldat, Amédée, parcourt la France de l’exode à la recherche de son régiment. Dans cette France de juin 40, il est amené à rencontrer de multiples personnages, certains abjects, d’autres sympathiques, d’autres encore simples silhouettes d’un pays qui débine.
C’est une guerre sans héroïsme, sans actions d’éclat mais au plus près de l’humain avec ses épisodes tragi-comiques ou absurdes. Le dessin en noir et blanc, bien que minimaliste, en dit long et créé une ambiance prenante que la justesse des dialogues renforce.
Bref, c’est superbe, l’instantané vrai et cruel d’une armée et d’un pays alors en déroute.
Dans un style très épuré, Pascal Rabaté nous offre sa vision de la débâcle de 40 à travers le regard d'Amedée Videgrain, simple soldat désabusé.
Ce premier volume se lit bien mais cela sent le déjà vu. Ce thème a maintes fois été traité au cinéma ( on pense évidement aux films de Robert Lamoureux -"la 7ème compagnie" ou encore à "jeux interdits" avec ce flot de réfugiés mitraillé par l"aviation allemande).
Reste des dialogues bien troussés et percutants sur cet épisode qui traumatisa l'armée française.