A
mandine cherche l'âme sœur partout, même sur le Net. Charlène, sa copine revenue d'un périple en Amérique du Sud, se met en tête de rencontrer son paternel qu'elle n'a jamais connu. Mano, lui, n'ose pas dire à Robinson qu'il doit démissionner pour ouvrir une boutique avec Samia, sa fiancée. Robinson, justement, a bien du mal, entre son magasin de DVD qui périclite, sa rupture d'avec Léa et son boulet de père que sa mère a encore mis dehors. Mais peut-être qu'un peu d'amour, adoucirait ce quotidien et ramenait le bonheur qu'il espère et attend.
L'inversion de la courbe des sentiments est, à la manière des films chorale qui plaisent tant, une histoire acerbe, drôle et ancrée dans son époque. Avec talent, Jean-Philippe Peyraud croque ses contemporains et s'amuse à entrechoquer leurs vies. Ils se croisent, s'aiment, se séparent, se rencontrent... Tout en se moquant des évolutions récentes de notre monde (les sites de rencontres, la cigarette électronique, le téléchargement etc...) le scénariste du Désespoir du singe dépeint une société perdue, incarnée à merveille par son héros, un quarantenaire cynique et désabusé. Une comédie de mœurs aussi, avec ces relations qui se font et se défont, ces sentiments qui changent au gré des humeurs et des quiproquos. En suivant, comme les meilleures séries TV actuelles, en parallèle le destin de plusieurs protagonistes, il égraine les situations avec naturel, sans que le plaisir de lecture ne faiblisse. Celles-ci paraissent improbables ? Certainement. Exagérées ? Totalement. Touchantes ? Évidemment. Car c'est là que réside la principale force de cet album : envoûtant même dans des circonstances ubuesques ou dans le ton juste même lorsque les séquences décrites sont caricaturales. Ainsi, en s'appuyant sur des dialogues qui font souvent mouches, les personnages restent crédibles et certains de leurs travers feront rire (jaune ?) nombre de lecteurs.
Graphiquement, l'auteur reste fidèle à une certaine ligne claire. Épuré, son style très fluide convient parfaitement à ce récit dynamique. Baignées de tons pastels, les planches pleine de vie ne sont pas sans rappeler les dessins d'Antonio Lapone sur le récent Greenwich Village. Un festival de couleurs tendres, où se mêlent avec bonheur modernité et petit côté rétro savoureux.
Sans retrouver la sensibilité de Il pleut ou l'universalité de Grain de Beauté, l'inversion de la courbe des sentiments n'en est pas moins touchant, juste et réussi. En proposant à ses fans un album comme il sait les faire, Jean-Philippe Peyraud s'offre ainsi un retour de qualité, chroniquant la vie de ses congénères avec humour et tendresse.
L'inversion de la courbe des sentiments représente une bd résolument plus moderne que celle des vieux Hergé et des tenants de la ligne claire. Une bd très mâture qui m'hésite pas à montrer le monde tel qu'il est dans ses multiples facettes. Les scènes dévoileront tout jusqu'au plus intime perversion. Il est justement l'antipode du one-shot sympathique ou du divertissement facile. C'est un peu comme un film de Woody Allen qu'il s'agit d'explorer pour découvrir ce qui se cache derrière la vie de tous les jours.
Le scénariste a une parfaite maîtrise du récit en se faisant entrecroiser 13 personnages qui ont des liens entre eux dans un Paris de nos jours avec par exemple la cigarette électronique en guise de mode. C'est pétillant, presque exaltant avec des dialogues qui feront mouche. Le dessin est certes épuré mais il est beau car il fait ressortir tous les détails du décors en soignant également les personnages facilement reconnaissables. Rien à redire sur le fond et la forme; soulignons juste l'immense talent de Jean-Philippe Peyraud, l'auteur de ma série culte Le Désespoir du Singe.
En conclusion, l'inversion de la courbe des sentiments ne laissera pas de marbre. Il s'agira également de l'inverser comme le chômage afin de se représenter ou bien de tricher sur les chiffres comme on peut tricher avec les sentiments. C'est dans la nature humaine.
Le dessin n’a rien d’exceptionnel – ni de mauvais, par ailleurs.
Il est simple, les couleurs aussi…
Mais au fil des pages, il permet de raconter avec simplicité l’histoire, sans attirer excessivement l’attention ou la détourner.
Même si quelques plans vu du dessus sont très sympas, le tout passe facilement et on entre agréablement dans l’histoire.
Celle-ci est à la fois simple (jamais rien de compliqué, une fille qui recherche son père, un homme qui cherche à se trouver un boulot, un autre qui cherche la sérénité…) et complexe.
Parce que toutes ces histoires simples quand elles sont prises indépendamment, se croisent et rend le tout dense, riche, touffu, comme la vie réelle.
Tout se croise et se retrouve.
Si certaines choses peuvent passer au second plan (comme la mammectomie), le tout se révèle très agréable à lire !
Fluide et crédible, chaque histoire se développe intelligemment, de façon réaliste, pour notre plus grand plaisir.
D’auteur que l’auteur se plaît à poser des scènes, à nous faire croire à des choses, pour les démonter ensuite, nous montrer qu’on s’est trompé, que la vérité est toujours tout autre, inattendue et ce, jusqu’au bout…
Un vrai plaisir à suivre !
Sur 190 pages, JP Peyraud réussit une belle performance. Celle de compter 6 histoires qui s'entrecroisent. 6 histoires, cela représente beaucoup de personnages à mettre en place. Mais le défi est plutôt bien relevé : les personnages sont profonds et attachants. L'intrigue est bien menée, et parsemée de moments cocasses, émouvants et très surprenants.
Une lecture très agréable qui en étonnera plus d'un... 7/10
Un peu étrange mais agréable à lire.
C'est sympa, ça raconte des évènements du quotidien de personnes comme vous et moi et c'est bien illustré malgré la pureté du trait.
L'auteur commence d'abord par dépeindre les protagonistes et leurs histoires dans une première partie. Dans une seconde, il bouleverse tout ce qu'il a mis en place et enfin, on termine sur un point complètement inattendu.
Une lecture agréable pour un livre qui porte bien son nom.
Je n'ai lu que quelques livres de Jean Philippe Peyraud, parmi lesquels le somptueux "le désespoir du singe".
Avec "L'inversion de la courbe des sentiments", je découvre une autre facette de cet auteur, à la fois sur le style que sur le ton.
J'ai immédiatement pensé à la série "Love Song" de Christopher, en découvrant le dessin assez épuré de Jean-Philippe Peyraud sur cet album mais aussi par les thèmes abordés.
Ce récit se veut à la fois intimiste (avec des histoires d'amours qui se font et se défont), drôle (avec le père de Robinson) mais aussi plus dramatique (comme la liaison de Gaspard avec une femme mariée), autour d'un personnage , Robinson. Personne complexe, d'une quarantaine d'année,assez blasé mais toujours à la recherche de l'amour , même sur internet
Auprès de lui, gravitent moult personnages, qui comme dans "la ronde" de Max Ophüls, finissent par se rejoindre.
Les dialogues font mouche et cette comédie douce amère (parfois tragique-voir l'épisode de la barque-) est très agréable à lire.
En tout cas la chute finale, dans tout les sens du terme, est bien amenée