V
asco Baglioni est envoyé au royaume du Maroc par son oncle Tolomeo, richissime banquier de Sienne. Il doit remettre un courrier à son propre frère, Lorenzo. Celui-ci, brouillé avec sa famille, est devenu chef de la garnison militaire de Marrakech, où il vit depuis de nombreuses années. Une de ses missions est de mettre hors d’état de nuire El Khamsin, bandit redoutable qui met à mal le commerce local, en attaquant les caravanes en provenance du Mali. D’alliances éphémères en trahisons durables, de serviteurs zélés en princesses courtisanes, Vasco se retrouve au centre d’une intrigue où chacun espère conquérir du pouvoir ou le conserver.
Cette série, apparue en 1979 dans Le Journal de Tintin, en est à son 27è tome. Imaginée par Gilles Chaillet, celui-ci en écrira les 26 premiers volumes et en dessinera 20. Son créateur ayant disparu en 2011, Le Lombard orchestre aujourd’hui la reprise. Luc Révillon, passeur infatigable entre l’Histoire et la bande dessinée, livre son premier travail scénaristique seul. Grand connaisseur de la saga, il en maîtrise les codes et semblait tout désigné pour prolonger l’œuvre. Dominique Rousseau, connu entres autres pour ses illustrations dans les périodiques destinés à la jeunesse ou Condor (six tomes de 1984 à 1998), en assure le dessin.
L’action se déroule au XIVè siècle, alors que le pouvoir change de main et de forme : les chevaliers s’effacent au profit des banquiers ; les guerres de territoires s’estompent pour des joutes financières. Partant de ce postulat original et historiquement documenté, les aventures de Vasco se développent sur un équilibre entre péripéties, luttes de pouvoir, voyages et reconstitution fidèle d’un Moyen Âge finissant.
Les Citadelles de sable respecte la tradition avec talent et pertinence. L’intrigue, fort bien menée et fouillée (il faut être attentif aux différents personnages et à leurs attributions), emmène le lecteur sur ce rythme toujours exigeant des 46 planches. Le découpage est efficace et ne se permet aucun temps mort. Les dialogues sont équilibrés et économes. Le dessin, quant à lui, de facture classique, entre Jean Giraud et Grzegorz Rosinski (avant qu’il ne passe à la couleur directe), rend aussi bien les étendues de l’Atlas que l’intimité des palais ou autres caravansérails. Il se caractérise aussi bien par sa dynamique que pour l’hommage rendu aux paysages pour ce qu’ils sont, indépendamment du récit.
La question des reprises des séries porteuses se pose régulièrement depuis plusieurs années. Elle n’aura jamais de réponse unanime et définitive. Elle doit reparaître à chaque publication pour que le lien es-qualité entre les auteurs, les éditeurs et le public ne disparaisse pas. À ce titre, Les Citadelles de sable remplissent leur rôle : prolonger un héritage sans le trahir, continuer l’œuvre au-delà de son créateur et, en son nom, donner à voir et à lire. Le plaisir doit encore prévaloir. Il est ici au rendez-vous.
Cette série avec un héros sans caracrtère était devenue sans âme, sans intérêt....voire ringarde.
Elle ressuscite grâce à ces deux auteurs qu'ils convient de saluer tant pour la qualité et les précisions des dessins que pour la très bonne tenue du scénario.
Avec tous mes encouragements pour la suite !