I
l était une fois une maison. Plutôt un immeuble, avec un air de déjà-lu ! Au rez-de-chaussée, le Père Léon devise avec Jéso Dedieu. À l’étage, Mlle Chapon accuse Monsieur Wolf d’avoir mangé sa petite sœur. Au-dessus, le jeune Pierre Pan vit au crochet d’un ancien officier de Marine. Et que penser de ces deux mineurs bientôt majeurs ? Mais toujours pas de raton laveur !
S’il fallait résumer Tout conte fée, il serait possible d’écrire que cet album porte un regard décalé sur ces histoires qui font le bonheur des pédopsychiatres et la fortune des studios Disney. En développant un peu plus, il pourrait être ajouté que Lionel Camou, pour une raison étrange, s’intéresse au devenir de l’éclectique microcosme des contes de fées, une fois les grimoires refermés et les enfants couchés ! Avec une fantaisie des plus débridées, il se laisse aller à quelques supputations sur ce petit monde, avançant pour l’occasion une théorie surprenante quant aux relations que notre réalité quotidienne tisserait avec ces univers de magie et de rêves. Ainsi, si le Grand Méchant Loup se tape Mère-Grand en cachette, c’est pour éviter de mettre prématurément le Petit Chaperon Rouge face à une sexualité résolument subversive qui insufflerait en elle des tensions primaires pour ne pas dire primales… Comprenne qui pourra ?
À la planche à dessins, Bandini s’en donne à cœur joie et prend visiblement plaisir à travailler avec son scénariste de père. Se jouant des styles comme des situations, cet opus se révèle être un véritable melting-pot de références visuelles et d’influences graphiques qui arrive, nonobstant de légers écarts, à conserver sa cohérence malgré la folie ambiante.
Tout conte fée réalise le grand écart entre Bruno Bettelheim et Tex Avery, tout en naviguant des Monty Python et Lewis Carroll. Ce faisant, il ne fait pas dans l’orthodoxie et le politiquement correct, mais c’est certainement là sa qualité première. La seconde étant qu’il faut au moins le lire deux fois pour en apprécier toute la subtilité !
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