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evenu indic de la police de Los Angeles et, notamment, de l'inspecteur Meltzer, Willima Lawford continue sa mission d'infiltration à Hollywood. La prochaine étape sera de rendre crédible la production de son film pour s'approcher au plus près des parrains du milieu. Heureusement, Mickey Cohen, associé de Bugsy Siegel et patron du casino le Flamingo Hôtel à Las Vegas, croit au projet et y voit surtout l'occasion d'ajouter une victime de plus du racket de producteurs mis en place par la Mafia .
Après L'usine à rêves qui posait le contexte d'une ville gangrenée par la corruption et d'un cinéma fascinait (et ponctionnait) par la Mafia, tout en présentant les (nombreux) protagonistes, Les Mirages de Bugsy vient clore ce diptyque. Mathieu Mariolle continue sa démonstration, toujours aussi fouillée, embarquant les lecteurs dans la lente descente aux enfers de son protagoniste. Car, à trop goûter aux fastes du luxe et à trop s'approcher des gangsters, William s'y fait et commence même à vouer de l'admiration pour ceux qu'il est censé faire enfermer. Le travail du scénariste est en cela intéressant qu'il montre la frontière tenue entre la loi et ceux qui la contournent, le jeu d'attirance-répulsion et les accointances entre la pègre et les notables, avocats, producteurs, police et même le FBI. Méthodiquement, il expose le tiraillement insoluble de son héros : retrouver l'assassin d'Isabella, réussir à produire son film pour son ami Max, arrêter Siegel et mettre à jour la corruption de la Police. Rien que ça ! Au fil des pages, la tension monte, le rythme s’accélère et le contexte historique (la chasse aux sorcières n'est pas loin) se met en place pour finir de poser une ambiance lourde et oppressante à l'issue inéluctable.
Kiko Duarte officie une nouvelle fois au dessin. Au diapason de son complice, sa prestation gagne en intensité : des cadrages diablement efficaces, un découpage nerveux, des décors soignés et des plans larges réussis. Les couleurs chaudes et la très bonne gestion des ombres et lumières de Claudia Boccato soulignent son encrage, maîtrisé, qui met en valeur aussi bien les visages d'anges des femmes que les gueules des malfrats et l'intensité des regards. La combinaison du tout laisse au lecteur sur une très bonne impression.
Conclusion réussie d'un diptyque dense, Les Mirages de Bugsy est un polar à l'ancienne, sur une période ambiguë de l'histoire des États-Unis. Ce second tome confirme au passage que l'association Mariolle/Duarte est souvent synonyme de qualité.
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