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'Estuaire : les malchanceux y naissent, les plus futés déguerpissement rapidement, les plus fous y retournent. Désillusions et gros coups de blues planent sur les Chronique(s) de nulle part, Starsky y décrit une série de personnages au bout du rouleau, autant hanté par leur passé que miné par leur présent. Souvent bavardes, ces petites nouvelles finissent par tisser une toile inextricable et un peu forcée. En effet, le scénariste avance à l'aveuglette en se contentant d'empiler les misères sans trop se soucier d'une quelconque direction générale. Certes, l'auteur l'explique dans la postface, la majorité des récits a été réalisée dans l'urgence pour meubler le sommaire de la revue AAARG ! dont il est le rédacteur en chef ; prise une par une, ces histoires fonctionnent plutôt bien grâce à une réelle qualité d'écriture. Par contre, leur réunion dans un volume ne les montre pas à leur avantage, bien au contraire.
Graphiquement, l'ensemble laisse également un sentiment mitigé. Les décors sont particulièrement efficaces - Rica a créé une ville imaginaire, mais qui se révèle familière aux yeux de tous -, une de ces petites localités anonymes où le temps semble irrémédiablement accroché aux pierres des maisons. Du côté des personnages, le résultat est moins percutant. Sans tomber dans le grotesque, le style réaliste du dessinateur manque néanmoins de précision. Le rendu fluctue d'une page à l'autre d'une manière peu esthétique. Au final, l'ensemble - la mise en couleurs très terne de Tocco y compris - laisse une impression d'inachevé.
Superficielle tant sur le fond que dans leur réalisation, les Chronique(s) de nulle part peinent vraiment à convaincre.
Je n'ai pas aimé et je n'ai pas accroché du tout. Il faut dire que ces 7 histoires sont reliées par une narration plombante qui raconte des choses sans intérêt en ce qui me concerne. Le procédé de cette pensée intérieure se décline au fil de ces petits chapitres. Il y a une certaine noirceur qui alourdit un peu plus le propos.
On croise des personnages assez sordides qui végètent un peu dans leur marre sans vouloir porter un quelconque jugement hâtif. Les lecteurs les plus assidus seront récompensés au final car ces séries se rejoignent comme pour une chorale administrant une dernière partition. Pour moi, cela a été trop déstabilisant avec un graphisme qui ne m'a guère séduit.