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e tous temps, les eaux de la mer Méditerranée ont vu pirates et marchands jouer au chat et à la souris. En cette fin de XVIIIe siècle, les États barbaresques (Alger, Tripoli, Tunis, Maroc), plus ou moins sous la coupe du grand Pacha d’Istanbul, règnent en maître sur le trafic maritime de la région. Fins négociateurs, ils rançonnent les navires et accordent ("extorquent" serait plus juste) des droits de passage à toutes les puissances du globe. Nouveaux venus sur la scène internationale, les États-Unis d'Amérique sont logés à la même enseigne et doivent payer tribut afin d'assurer la sécurité à leur flotte. Différents incidents et les demandes de plus en plus démesurées du potentat de Tripoli vont envenimer la situation pour en arriver, en 1801, à une guerre ouverte !
Trois ans plus tard, après de nombreux échecs et un blocus naval inefficace, le président Thomas Jefferson accepte l'idée d'une expédition terrestre pour prendre l'ennemi à revers. William Eaton est chargé de rassembler une troupe de cinq cents mercenaires pour accompagner un détachement de huit soldats américains. Partant d'Alexandrie, ils s'apprêtent à marcher plus de sept cents kilomètres dans le désert pour atteindre leur objectif. L'épreuve va être terrible, les combats sanglants et le résultat bien amer pour les premiers « Marines » de l'Oncle Sam.
Peu connu, le conflit entre les tous jeunes USA et le Royaume de Tripoli marque l'entrée de cette nation dans le monde des relations internationales. Dans Tripoli, Youssef Daoudi reprend à son compte cette épopée guerrière et fondatrice. La narration, qui se veut fidèle aux faits, manque malheureusement de clarté – les premières pages à la chronologie éclatée sont particulièrement confuses – et de nuance. De plus, les quelques interprétations personnelles de l'auteur se révèlent être très caricaturales et convenues. À titre de comparaison, dans un genre différent il est vrai, le lecteur trouvera une vision nettement plus convaincante de ces événements dans le premier volume des Meilleurs Ennemis de Jean-Pierre Filiu et David B.
Le scénario donne néanmoins un aperçu convaincant de cette folle aventure, aussi bien du côté de ces soldats perdus dans le sable que du côté des diplomates de salon. Malgré une tendance à forcer son trait pour souligner ses propos, le dessinateur arrive à dépeindre adéquatement le sort de ces individus grâce à une approche stylistique réaliste classique. Négociateurs iniques, soldats prêt à mourir et condottieres avides sont embarqués, non pas sur une galère (même si c'était pratique courante à l'époque), mais dans une terrible épopée aujourd'hui oubliée malgré son importance dans l'Histoire.
Tripoli est une de ces bd qui m’a le plus marqué dans le sens qu’elle m’apprend véritablement un aspect de l’Histoire américaine totalement méconnue. Jefferson est alors le premier président de la jeune nation américaine. Les navires qui sont de passage dans la Méditerranée doivent alors verser un tribut contre protection à des gouverneurs véreux mis en place par les sultans.
En 1801, l’Etat barbaresque et pirate de Tripoli est dirigé par un homme qui n’a pas hésité à assassiner son frère pour prendre le pouvoir et contraindre l’ainé en exil. Il en veut toujours plus avec un zest de fanatisme et d’intolérance. Il n’a que faire du traité de paix signé avec les Etats-Unis. Il n’hésite pas à attaquer l’un de leur navire de guerre et emprisonner les 200 marines pour les réduire en esclavage.
J’avoue avoir été bluffé par le style de cet auteur qui a su mener jusqu’au bout sa réflexion sur ce qui a influencé la diplomatie américaine. Tout est bien savamment dosé. Le récit a été passionnant de bout en bout et les personnages assez charismatiques. Rien à réduire concernant un décor dépaysant.
On ressort incontestablement de cette lecture avec un autre regard car la fin est plutôt marquante. On se dit également que Tripoli est une cité qui a plutôt bien réussit aux différents dictateurs qui se sont succédés. Entre trahison, piraterie, esclavage et guerre, les faits marquants ne manquent pas dans cette histoire militaire américaine. Il est plus qu'intéressant de découvrir le premier fait d’armes des Etats-Unis en dehors de leur territoire. Cela ne sera guère glorieux malgré la victoire. Qui a dit malheur aux vaincus ?
Album correct.
L'histoire est parfois un peu confuse pour que ce soit un bon album, certainement parce que la chronologie n'est pas respectée au début. Une voix off apparaît d'ailleurs après une vingtaine de pages pour éviter au lecteur de s'égarer.
Du point de vue historique, on reste sur sa faim. Difficile de considérer cette aventure "pittoresque" comme un événement fondateur de l'impérialisme du Grand Satan vu le peu d'engagement de ce pays dans cette escarmouche. Et quitte à y consacrer 80 pages, on pourrait parler des anglais qui sont en Égypte depuis 1801? Et quel genre de commerce venait faire les US pour avoir des problèmes que les européens ne semblaient pas rencontrer. Les 20 pages de traversée du désert sont un peu longues.
Rien de chamboulant, mais les dessins font leur boulot, on parle, comme l'indique le 4e de couv, d'un évènement qu'on oublie mais qui a posé les bases de l’interventionnisme américain et de leur militarisme mondial, tout en suivant une lutte glorieuse pour la liberté qui a fait combattre chrétiens et musulmans épaules contre épaules, avant de finir en eau de boudin par la trahison de l'administration américaine, comme un mauvais cliché hollywoodien.
Et pourtant, l'histoire est ce qu'elle est. Je ne sais absolument pas si l'auteur a déformé, omis ou négativisé certains points dans son récit, mais je l'ai trouvé plutôt détaché et l'expliquant assez clairement.
Une bonne histoire et une BD "historique" pas chiante à lire, même si d'aucuns trouveront alors la vision de l'auteur un peu simpliste et l'écriture un peu facile.
Beau documentaire géopolitique.
Cet album retrace la tentative de renversement du Pacha de Tripoli.
Cette aventure marque la première opération du corps des Marines (7 hommes) hors territoire américain.