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econnu par ses pairs – il a été grand-prix à Angoulême en 1997 -, et un peu moins par le public, Daniel Goossens construit dans son coin une œuvre toute personnelle et inclassable. Certes, ce pilier de Fluide Glacial fait dans l'humour, mais discret. Il est un explorateur de la drôlerie qui ne cesse d'arpenter des terres vierges pour en ramener des gemmes à l'état brut. Très espiègle, il délègue ensuite au lecteur la tâche de révéler l'éclat du joyau. Il n'y a pas de raison qu'il doive se coltiner tout le travail.
Dans Passions, les emblématiques Georges et Louis se penchent – enfin, surtout Louis comme d'habitude – sur l'Amour. Des champs de coton du Sud des États-Unis aux grandes plaines de l'Afrique sauvage, en passant par les quartiers chauds de nos villes, les délices et les tortures des sentiments se retrouvent partout et sous toutes les formes. En accumulant les observations décalées dans un univers absurde rempli de références (à ses collègues, au cinéma, la littérature, etc.), l'auteur réalise le tour de force de parler de tout sans jamais parler de rien, sans en avoir l'air évidemment, sinon ça serait moins drôle. En résumé, les Monty Pythons rencontrent Ingmar Bergman un soir de carnaval : le mélange de distanciation, de clins d’œil et de pseudo-morale fonctionne à plein régime. Le rigolo ne se cachant pas forcément là où on le croit.
Les amateurs seront comblés, les autres sans doute surpris, toujours est-il que Passions est jubilatoire.
Un excellent Daniel Goossens. On retrouve son humour habituel mais avec beaucoup d'intensité et tout est bon dans cet album.