P
hilippe est couronné alors qu’il n’a pas dix-huit ans. Heureusement, son père l’a préparé à sa charge dès son plus jeune âge, en le confiant à divers conseillers dont le théologien augustin Gilles de Rome, auteur de ce qui est considéré comme l’un des premiers traités politiques de l’histoire occidentale. Il est bien décidé à asseoir son autorité sur ses vassaux qui supportent mal son ingérence. Pour cela, il lui faut des caisses pleines et le riche clergé semble être la victime toute désignée pour lever des impôts exceptionnels. Ce faisant, il s’attire les foudres du Souverain Pontife qui veut réaffirmer la primauté de l’Église sur les royaumes terrestres.
La collection Ils ont fait l’histoire se lance avec Vercingétorix et Philippe le Bel. Les auteurs ont choisi d’apporter un éclairage sur ce monarque surtout connu pour la destruction de l’ordre des Templiers. Ils ne vont pas s’attacher à cet événement qui a déjà beaucoup excité l’imaginaire. L’objectif de Mathieu Gabella, assisté des historiens Valérie Theis et Étienne Anheim, est de faire découvrir un homme qui a profondément changé la façon d’exercer le pouvoir. Dans une hiérarchie toujours issue du modèle féodal, il n’est que le premier des seigneurs, ces derniers ayant bien peu d’obligations à son égard. Il cherchera toute sa vie à renforcer la royauté, développant les germes du futur État monarchique français. Dans un contexte de crise économique, son règne sera marqué par une course incessante après l’argent. Pour ce faire, il s’entoure de financiers et de juristes, faisant du droit une arme pour la gouvernance. Retors, ambitieux, ne s’arrêtant devant rien ni personne – le Pape Boniface VIII en fera l’amère expérience –, il répugne à utiliser la force militaire – la guerre est onéreuse – mais il peut se montrer impitoyable quand il y est contraint.
La narration parvient habilement à capter l'attention, bâtie comme un véritable thriller politique et proposant une représentation de la société médiévale du XIVe siècle des plus convaincantes. Sur ce dernier point, le graphisme de Christophe Regnault remplit parfaitement son office et fournit une reconstitution des lieux très pédagogique. Les pages consacrées aux intrigues et autres complots bénéficient de ses cadrages serrés et de son travail sur les expressions, tandis que le chaos et la sauvagerie se ressentent dans les scènes de combats.
Issu d’une recherche méticuleuse, Philippe le Bel met en avant un personnage passionnant dans le cadre d’un divertissement réussi. Avec Vercingétorix, tout aussi agréable, cette nouvelle collection est née sous de bons auspices. Ce qui fera peut-être frémir certains amateurs, trente tomes étant à priori en chantier avec, pour 2014, Charlemagne, Jaurès, Saint-Louis, Soliman et Napoléon.
Interview de Mathieu Gabella (scénariste) et Cédric Illand (éditions Glénat)
Ce n’est sans doute pas la biographie la mieux construite qu’on ait pu lire sur un personnage important ayant marqué l’Histoire de France. Certes. Cela n’en demeure pas moins assez intéressant car il est finalement peu connu du grand public. On apprendra que son rôle a été central pour définir ce qu’allait devenir la royauté sous un pouvoir centralisé. On verra également sa lutte contre le pape Boniface qui se croyait au-dessus des rois. Bref, j’ai appris des choses et c’est ce qui compte réellement. Côté dessin, cela me satisfait.
Pour le reste, Philippe le Bel n’était pas un mauvais roi avec une conduite plutôt exemplaire notamment dans sa vie privée. On ne pourra pas en dire autant des gouvernants qui se sont succédé depuis. Le dernier en date a assez fait couler d’encre. Oui, la dignité et le sens des valeurs sont de réelles qualités. La grandeur de la France faisait partie de ses préoccupations.
On lui doit la destruction de l’ordre des templiers mais cet aspect sera un peu évoqué surtout à la fin de son règne. On retiendra que c’est surtout l’argent qui constitue le nerf de la guerre. Oui, il avait compris que c’est bien l’argent qui était son véritable ennemi. Il faut dire que son règne a été charnière entre une période de prospérité et une véritable crise qui allait durer plus d’un siècle comme une sorte de régression.
Ce titre fait partie d’une collection qui va mettre en avant plusieurs figures qui ont fait l’Histoire. C’est une bonne entrée en matière. Je vais poursuivre avec Vercingétorix…
Encore une BD qui nous détend et nous rappelle un pan d'histoire de France.
Ici le scénario est un peu plus fouillis que dans Vercingétorix mais reste agréable à lire. On regrettera parfois la foison de détails.
Coté dessins rien à redire.
Bonne lecture.
7/10.