« LAP », un mot qui claque sous la langue. Une onomatopée mystérieuse. Trois lettres qui forment un tout, pour désigner le « Lycée Autogéré de Paris », sis dans le 15eme arrondissement. Un lieu peuplé de Lapiens, composant dans un harmonieux chaos une structure éducative et d’enseignement relativement éloignée du système scolaire classique de l’Éducation Nationale.
C’est sur cette expérience, née il y a une trentaine d’années, qu’Aurélia Aurita (Fraise et chocolat, Je ne verrai pas Okinawa, Buzz-moi) se penche avec un enthousiasme non dissimulé dans un one-shot, justement sous-titré Un roman d’apprentissage. Après un an d’immersion et d’observation, elle livre son témoignage sur la réalité de cet établissement pas comme les autres. Sorte de reportage engagé, sa bande dessinée présente le concept du LAP, les professeurs et les élèves, met en exergue ses singularités et son côté assez démocratique, tout en faisant ressortir, en filigrane, les failles de la filière habituelle. L’aventure lapienne ainsi retranscrite se révèle intéressante, d’autant plus que l’empathie et l’implication de l’auteur éminemment palpables apportent un souffle indéniable au propos. Néanmoins, le tableau dressé ne se veut pas totalement idyllique et certains aspects moins reluisants, apparus au fil du temps et des événements, ne sont pas oubliés, à commencer par le simple respect des locaux, dont le maintien de la propreté échoie à tous, bien que ce soit souvent les mêmes qui s’y collent.
Expressif, vif, sans aspérité ni fioriture, le trait d’Aurélia Aurita accompagne parfaitement l'histoire, pour offrir une vision positive et instructive de ce lycée autogéré. Il n'aurait cependant pas été vain d'ajouter un zeste de recul.
>>> Site du Lycée Autogéré de Paris.
C'était la dernière oeuvre d'Aurélia Aurita que je n'avais pas encore lu. C'est chose faite. On s'aperçoit de tout le chemin parcouru depuis Angora. Elle arrive encore à nous surprendre en abordant un sujet totalement différent de ce qu'elle a déjà produit. C'est également une oeuvre plus mâture, comme une sorte de documentaire dans un établissement scolaire autogéré.
Ce lycée se situe à Paris. Ce n'est pas un lycée comme les autres. Il n'y a que des professeurs et des élèves: pas de directeur ou de membre du personnel. Par ailleurs, il y a une libre fréquentation des cours en échange de faire un peu des tâches ménagères. J'ignorais que cela pouvait exister. bref, c'est une expérience unique comme un peu ces villes utopiques crées autrefois par des philanthropes.
Comme à chaque fois, c'est beau, drôle et parfois émouvant. j'aime beaucoup l'approche faite par l'auteure qui est tombé amoureux de ce lieu et qui pourtant n'était au départ qu'une simple observatrice. Elle nous fait partager une expérience singulière et touchante. C'est un vrai roman d'apprentissage.
Sous-titré « Un roman d’apprentissage », le nouveau livre d’Aurélia Aurita confirme le talent de la dessinatrice, et démontre encore qu’il est bien difficile de l’enfermer dans une case. Révélée par Fraise et Chocolat, sulfureux livre sur sa vie sexuelle et amoureuse, elle a ensuite prouvé sa subtilité avec l’excellent Buzz moi, sur la gestion d’un succès inattendu et les approximations journalistiques, ou encore avec Vivi des Vosges, belle fiction sur une enfant sauvage.
Dans LAP !, elle revient à la première personne en retournant, avec douleur, sur les bancs de l’école. Le LAP, c’est le Lycée Autogéré de Paris, une institution publique où les cours ne sont pas obligatoires, où il n’y a pas de notes, où le bac n’est pas une finalité en soi, mais où les élèves se fixent des objectifs à tenir et participent au ménage et à la cuisine.
Aurélia Aurita va fréquenter ce lycée durant un an, jusqu’à se fondre dans les murs (lire son interview ici). Interrogeant professeurs et élèves, ne cachant pas les difficultés incessantes – peu de soutien des institutions, lassitude des enseignants, difficultés de la sanction quand les quelques règles sont outrepassées – elle décrit un passionnant laboratoire d’éducation. Loin d’être une école de seconde zone pour gamins en déshérence, et ce même s’il accueille un certain nombre d’élèves en rupture scolaire, le LAP donne des cours et forme de belle manière des esprits libres. Si certains cas restent de douloureux échecs, on constate que le contrat de liberté respectueuse permet de vraies émancipations et élimine de nombreux défauts d’un système brisant les élèves.
Loin d’être angélique, l’auteure ne cache ni les doutes, ni les échecs, mais transmet avec force la passion commune de tous les occupants (le triptyque enseignants, élèves, agents) du LAP pour leur établissement. Le LAP appartient à tout ceux qui y sont inscrits, l’autogestion nécessite des réunions multiples et une démocratie participative souvent contraignante, mais le résultat est là : de nombreux lycéens trouvent enfin le lieu où ils peuvent vivre et grandir conformément à leurs besoins. La fête de fin d’année célébrant les 30 ans du lycée le prouve bien, l’attachement des anciens est toujours fort et leurs chemins ont continué de se tracer, souvent en conformité avec leurs projets.
On y apprend même que la plupart des élèves ayant comme projet d’avoir le bac réussissent plutôt bien, tandis que les autres auront appris ce qui leur semblait manquer (et qui sort souvent des discipline scolaires : cuisine, entretien et réparation, jardinage…). Même si le portrait n’est pas idyllique, on ne peut que sortir profondément stimulé de ce premier tome (trois sont annoncés) et avec un seul regret : en France, il n’existe qu’une petite quinzaine de collèges et lycées de ce type…