C
ertaines couvertures peuvent induire le chaland en erreur sur le contenu d'un album, mais celle de L'homme qui assassinait sa vie n'est pas de celles-là. À sa vue, le lecteur est immédiatement plongé dans le bain (de sang). Après Baru et le non moins sanguinolent Canicule, c'est au tour d'Emmanuel Moynot de signer une adaptation d'un texte de Jean Vautrin dans une nouvelle collection consacrée aux œuvres de l'écrivain.
Véritable roman noir teinté de polar social, le scénario fait penser à un grand melting pot où tous les thèmes et les manières du genre se côtoieraient dans l'huile bouillante. Après une introduction présentant les acteurs de cette tragédie contemporaine (un ex-taulard sur le chemin de la vengeance, un privé décati au bout du rouleau, un commissaire hargneux revenu de tout, quelques trafiquants de chairs humaines et, même, tout droit sortie de la Troisième Internationale, une inoxydable militante communiste à la recherche de son fils autiste), l'action prend le dessus. Quiproquos divers, coups fourrés en pagaille et fusillades à qui mieux-mieux se succèdent dans une espèce de spirale incontrôlable. Incontrôlable ? À première vue seulement, car Moynot tient fermement la barre et conduit son histoire très efficacement. Les différents détails biographiques égrainés en début d'ouvrage deviennent cruciaux cinquante pages plus loin, tandis que la chronologie, apparemment erratique de prime abord, se révèle être sans bavure quand les corps commencent à s'accumuler. Même si, par manque de place, certains points sont passés à l'as, le scénariste a su garder l'essentiel du récit : à part, peut-être, un chien, il n'y a pas grand-chose à sauver dans cette époque pourrie. Âmes sensibles s'abstenir (sérieusement, la couverture ne vous avait pas mis la puce à l'oreille ?).
Après Hurlements en coulisses, opus aux dessins volontairement lâchés, l'artiste retrouve un style plus posé. À ce propos, quelques tronches bien senties et plusieurs séquences urbaines rappellent le coup de crayon de Jacques Tardi. Trois enquêtes en compagnie de Nestor Burma ont laissé des traces ! Passé outre ce petit air de famille, le résultat est des plus convaincants, spécialement grâce à un savant travail au niveau de la mise en couleurs. En effet, celles-ci font plus qu'accompagner la narration, elles participent activement à la construction des scènes en imposant des atmosphères tranchées d'une page à l'autre.
Emmanuel Moynot a dévoré et digéré la prose de Jean Vautrin. Résultat, L'homme qui assassinait sa vie porte sa griffe, bien profondément incrustée dans sa chair.
L’homme qui assassinait sa vie est une sorte de malade mental névrosé qui tire sur tout ce qui bouge ou plutôt sur tous les êtres qu’il côtoie dans sa vie. Le fond est trop noir et trop glauque pour une petite âme comme la mienne.
J’ai littéralement détesté ce récit qui constitue une sorte de road-movie descente aux enfers concernant deux paumés. On n’oubliera pas la vulgarité dans le dialogue afin de conférer une certaine atmosphère grivoise à ce récit pour mâles dominants cyniques.
A la base, il s'agit de l'adaptation d'un polar noir de Jean Vautrin publié en 2001 qui reprend tous les poncifs du genre. Les tontons flingueurs épris de vengeance entre flics pourris et femmes libidineuses ne sont sans doute pas ma tasse de café. Mais plus encore, on sent que la BD a voulu être fidèle a roman ce qui entraîne des enchaînements manquant singulièrement de naturel et de dynamisme.
Bref, c'est véritablement un concentré de tout ce que je déteste. Un polar jubilatoire pour les uns, un désastre absolu pour les autres. En tous les cas, une grosse déception pour moi. Par ailleurs, il faut savoir que le tarif moyen d'une BD dans notre pays se situe autour de 14€ actuellement et c'est sans compter sur l'impact environnemental d'un tel gâchis. A ce prix-là, il ne faudrait pas se tromper...
Plus que dispensable, sauf si vous vous ennuyez vraiment (ce que je ne pense pas).