A
u loin, un vestige préhistorique à tête de Mickey projette son ombre angoissante sur une forêt obscure à la végétation folle. Dans ce fouillis de branches et de ronces avance un tacot fumant, pétaradant, bringuebalant… Ainsi débarquent Jack et Hammerfist, simiesques individus peu fréquentables et portés sur la boutanche. La défonce, c’est leur lot quotidien. Les bourre-pif aussi. Faut bien se défendre dans ce monde dévasté où les hommes, dégénérés, sont parqués dans des réserves par des animaux qui ont pris le pouvoir. Pour en faire quoi ? Plus ou moins n’importe quoi. À croire qu’ils ont été à bonne école.
Amis des psychotropes en tous genres, bonjour ! Pozla et El Diablo, après un premier tome déjanté, remettent le couvert. Au menu, hallucinations diverses et variées, fumettes de premier choix, alcool frelaté, squats pas très ragoûtants, caïds à la peau écailleuse, dettes d’honneur, mafias balourdes qui ne lésinent pas sur les moyens et surtout tentative de reconquête par un général d’opérette. Le tout sur fond d’improbable coming-out. Le délire, il est bien là. La cohérence aussi, malgré tout. Et puis avec un dessin pareil, difficile de se prendre au sérieux. Il peut paraître bâclé, mais c’est tout le contraire. C’est crade, les bestioles ne ressemblent à rien, les couleurs font mal aux yeux… et pourtant ça a de la gueule : ça fait du bien de voir des auteurs mettre leurs tripes sur la table sans avoir peur de salir la nappe.
Allez les gars, on s’en jette un petit dernier et on est reparti pour un tour ?
Ce gros kiff, parmi le top Label 619 Ankama à côté de The Grocery.
Le tome 1 pose les bases, tâtonne quelque peu tant graphiquement que scénaristiquement. Le 2 met les pieds (sales) dans le plat dès les premières pages et enchaîne les grands moments avec en particulier une séquence psychédélique aux crayons de couleurs absolument mémorable. C'est trashouille mais pas idiot et ça ne s'encombre jamais de limites/de complaisance ou de retenue. Tous les potars du délire sont poussés à fond et on se dit que peu de médium permettent autant que la BD, précisément lorsque des timbrés pareils sont aux commandes.