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otée par la fée noire Mab d'une splendeur sans pareille qui rend tous les mâles fous d'elle, Morue, devenue reine Beauté, a fait sombrer son royaume dans le chaos. La fin de La reine indécise l'abandonnait en haillons, fuyant son palais en flammes en compagnie de sa fille et se demandant comment se sauver de ce terrible drame généré par sa vanité. Annuler le sort pour redevenir moche ? C'est un plan digne de la sottise de Morue, mais, heureusement, Hubert est bien plus malin qu'elle. Piégée par ses sujets, Beauté est vendue au roi Sanglier qui se l'approprie comme prise de guerre au grand dam de ses vassaux. Mise au service de Sa Majesté comme toutes les maîtresses royales, elle subit les viols répétés en silence. Marine grandit et son intelligence se développe, conformément à la promesse des fées. La petite fille va aider sa mère à dévoiler son secret et à trouver des alliées pour éloigner son ravisseur. Pendant ce temps, le chevalier Eudes et la princesse Claudine associent muscles et cerveau pour reconquérir le Sud. Apprenant que Beauté est en vie, Eudes tente une opération désespérée pour la secourir. Le roi Sanglier sombre dans la paranoïa, à l'instar de Maxence, et va s'emmurer avec ses deux captives dans une tour sordide.
Le final d'une histoire est un exercice difficile. Après avoir suscité l'attention, fait monter le désir dans les tomes précédents, la chute doit être à la hauteur, inattendue tout en respectant un sens et une morale propres aux codes des contes. Moult rebondissements épiques à la clé, Hubert conclut avec brio son observation sur l'apparence, aussi chatoyante soit elle. Dans la plupart des fables, les jeunes filles sont parées d'un charisme irréel et sont sottes comme des paniers. De cette trame, il déroule un fil réaliste : la beauté se transforme en fardeau à cause de la valeur que l'humanité lui donne, peu importe ce qu'il y a à l'intérieur, elle suscite admiration au delà de toute raison, convoitise et folie. Le premier volet évoquait l'ascension, le deuxième l'apogée de la reine Beauté, le dernier s'avère christique avec sa longue descente aux enfers avant sa victorieuse résurrection, le renversement des idoles et l'avènement d'un gouvernement de paix. Le chemin de souffrances reste dans la plus pure tradition allégorique, c'est à travers la maternité, rôle de la femme par excellence, que Morue trouve sa rédemption. Un proverbe arabe dit que « la beauté est une demi-faveur du ciel, l'intelligence est un don ». C'est l'esprit de Marine qui va faire de la malédiction de sa mère un vrai pouvoir. La morale est sans appel : seule, la splendeur est chaos, alliée à l'intellect, elle gouverne le monde.
Côté illustration, le dessin est toujours aussi magnifique qu'efficace. Il n'est pas facile de représenter l'absolu, de trouver une image aussi forte que les mots. Pourtant, le trait du duo Kerascoët parvient à donner une image sublimée de l'héroïne, ses grands yeux noirs transpercent les pages et l'âme du lecteur avec le même éclat qui brise les cœurs des hommes des hommes s'agenouillant devant elle.
Plus sombre et mystique que les précédents, Simples mortels s'affirme comme une petite merveille qui referme avec panache ce triptyque digne des plus beaux mythes.
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Quel foutoir ! Hubert a trop chargé la barque. A mon avis, il ne sait plus ce qu'il raconte. Le seul personnage qui a aimé sincèrement Morue/Beauté et qui s'appelait Pierre a disparu.
La série se termine avec un "happy end" assez inattendu au regard des albums précédents, mais finalement bienvenu. Le scénario et l'humour sont toujours aussi caustiques, mais le personnage de Beauté a gagné en sagesse et en clairvoyance, et au final tout est bien qui finit bien.
Une série au bout du compte extrêmement plaisante, servie par un dessin certes épuré et des couleurs très vives, mais qui personnellement me plaisent beaucoup.
Graphisme épuré, aplats de couleurs écrasants : si vous n'avez pas aimé le premier tome, les deux autres sont à l'avenant.
Un fabliau simplet a été étiré sur trois albums pour en faire un enseignement pesant.
Le résultat ? Un long pensum. Pour amateurs du genre.