L
ondres, fin du XIXème siècle. La journée s’écoule tranquillement pour Mme Stowner et sa domestique, Emma, jusqu’au moment où la sonnette retentit. Devant la porte, un homme attend, confus et maladroit. William Jones, aîné d’une riche famille de commerçants qui a réussi à intégrer la haute société anglaise, s’est enfin décidé à rendre visite à celle qui a été sa gouvernante. Malgré la courte durée de l’entrevue, le noble a remarqué la douceur et la gentillesse d’Emma. Épris, il tente alors de la revoir. Une tendre et chaste relation se noue entre les jeunes gens, sous l’œil bienveillant de l’ancienne préceptrice et les encouragements d’Hakim, le riche ami indien de William. Mais quel avenir peut bien avoir cette romance dans le monde si cloisonné qui est le leur ?
D’abord publiés par Kurokawa, les dix tomes de Emma sont repris, en intégrales (chacune reprenant deux volumes) cette fois, par Ki-oon dans sa collection Latitudes. Conçue avant Bride Stories, primé à Angoulême, cette série de Kaoru Mori met en scène une domestique qui s’éveille à l’amour et doit faire face au fossé qui sépare la gentry des gens du commun. Le présent opus narre la rencontre de l’héroïne et de son prétendant, tout en distillant les éléments qui, dès la deuxième moitié de l’album, viennent assombrir cette idylle naissante et laissent entrevoir de futurs obstacles.
À travers le destin de ces deux personnages, la mangaka dépeint avec justesse ce qu’a pu être une certaine existence durant l’ère victorienne, mais aussi l’importance de rapports de classe particulièrement prégnants. En intégrant Hakim, elle évoque également le prestigieux empire colonial britannique. Si le ton est évidemment posé, mesuré et que le drame d’une romance impossible se profile, le propos n’est cependant pas dépourvu d’une certaine légèreté. Cette dernière provient autant de la maladresse sentimentale et gestuelle des deux amoureux que de la présence du prince indien qui met son grain de sel partout et jouit – du moins en apparence – d’une bien plus grande liberté. L’ambiance n’a donc rien d'emprunté, malgré le cadre guindé du milieu mis en scène. Au contraire, le récit dégage douceur, affabilité, tendresse, alors même que Kaoru Mori ne manque pas, à plusieurs reprises, de souligner quelques étroitesses d’esprit et traits de caractère peu enviables.
Côté dessin, le trait possède une élégance certaine, bien qu’il s’avère un peu statique. Le travail sur les tenues est soigné et précis, les cadrages relativement variés tout en restant très classiques, et le découpage aéré assure une grande aisance de lecture. Néanmoins, le fait que la nouvelle mouture proposée par Ki-oon bénéficie d’un format plus grand dessert en partie le graphisme, car les cases montrant des gros plans sur les visages paraissent malheureusement un peu vides.
Pour ceux qui n’avaient pas pu de découvrir l’univers victorien d’Emma lors de la première publication du titre, voici une belle occasion de s'y frotter. Les autres se replongeront avec plaisir dans cette histoire au charme légèrement désuet.
Je le revendique haut et fort : j’adore les histoires de romance ! Je suis un grand fan par exemples des œuvres de Nicholas Sparks car je collectionne tous les films tirés de son œuvre. J’aime quand les films de lovers me font pleurer à l'image de Nos étoiles contraires. Cela va à l’encontre des critiques qui généralement cassent ce genre qui a mauvaise presse. A l’inverse et curieusement, les critiques louent assez souvent les comédies. Pourtant, savoir faire pleurer est également tout un art comme savoir faire rire.
Ce qui m’a plu dans Emma, c’est que cela paraît être une histoire intemporelle même si l’action se situe dans l’Angleterre victorienne. Il s’agit de l’amour impossible entre deux membres de castes différentes. Le ton est donné dans le premier tome lorsque le père Jones indique qu’il y a bien un Royaume-Unis sur le papier mais en réalité deux pays différents: celui de la bourgeoisie et celui du petit peuple. L’amour peut-il transcender les classes sociales ? C’est bien le thème de ce manga.
La formule est toujours la même, les passages obligés sont toujours les mêmes, les clichés sont toujours les mêmes mais c'est tellement bon, tellement confortable de se replonger dans ce genre de manga ultra-romantiques, complètement premier degré et qui s'assument comme tels. Ce manga fait ce qu’on lui demande : nous transporter dans une histoire d’amour avec une attachante et belle petite soubrette comme héroïne.