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ace aux flammes qui rongent les chairs du Grand Maître des Templiers, Isabelle, princesse de France et reine d’Angleterre, songe à son destin. Fille d’un roi, épouse d’un autre, son sexe et son rang ne lui ont jamais permis de choisir librement. Quant à ses désirs, si elle en a, ils ont toujours été assujettis à sa fonction : tus avant même d’être exprimés. Pire, Isabelle doit souffrir en silence que son mari lui préfère des amants. N’ayant que son fils pour toute consolation, celle qui ne connait de l’amour que la raison d’État rumine sa haine et sa rancœur, en attendant son heure ; celle où elle pourra enfin prendre en main les rênes de sa destinée.
Après Aliénor, la légende noire, la série Les reines de sang accueille la première partie du diptyque consacré à Isabelle de France (1292-1358). Surnommée « la Louve » en raison de son caractère violent, cette souveraine d’Angleterre, fille de Philippe le Bel, est connue des amateurs de romans historiques pour la place et le rôle qu’elle occupe dans la célèbre saga de Maurice Druon, Les rois maudits. Respectant cette image de femme à poigne aux passions ravageuses et dont l’ascendance capétienne a été, entre autres facteurs, à l’origine de la Guerre de Cent Ans, Thierry et Marie Gloris brossent un portrait fort et intime du personnage. En donnant la parole à leur héroïne, par le biais d’une voix-off omniprésente, le duo lui confère une proximité et une humanité appréciable, lui ménageant ainsi la sympathie du lecteur face à son sort peu enviable, malgré une certaine froideur et une rigidité palpable.
Classique et linéaire, la narration est relevée par les nombreux complots et jeux de pouvoir qui se déroulent simultanément à la Cour. Intrigues et revendications de Robert d’Artois – souvenez-vous de Jean Piat dans le téléfilm de Claude Barma en 1972 -, discussions autour du duché de Guyenne et de la vassalité d’Édouard vis-à-vis du roi de France, ou encore affaire de la Tour de Nesle, rien n’est oublié et tout est traité avec soin, mais sans exagération par les scénaristes. Le procédé est efficace puisqu’il permet de maintenir l’attention tout en faisant monter progressivement le suspense jusqu’à la dernière page. Le récit est joliment porté par le graphisme de Jaime Calderón qui a su saisir toute la complexité de la principale protagoniste, comme en témoigne la couverture de l’album. Son trait réaliste se révèle expressif et campe de façon convaincante les différents acteurs de cette histoire. Le dessin est également précis dans les découpages et la mise en page, assurant une bonne fluidité et une aisance de lecture. La richesse des décors et la recherche évidente dans les costumes donnent du corps à l’ensemble, que vient encore rehausser la colorisation de bonne facture de Johann Corgié.
Malgré quelques défauts, voilà un premier volet plaisant et plutôt bien mené qu'il serait dommage de bouder.
Série très inégale mais Isabelle est très bien scénarisé et dessin d'excellente qualité !!!
Se lit lit d'une traite avec grand plaisir.