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oulant exaucer le dernier vœu de sa grand-mère mourante, Billy Summer s’envole pour Séoul afin de participer à une cérémonie commémorative donnée en l’honneur des vétérans de la guerre de Corée. De plus, c’est pour lui l’occasion rêvée de prendre le temps de réfléchir à sa relation avec Émily, tout en essayant d’en apprendre un peu plus sur ce grand-père tombé au front un demi-siècle plus tôt. Pensant assister à la décoration à titre posthume d’un héros de guerre, il va cependant vite découvrir d’autres vérités sur cet aïeul qu’il n’a jamais connu.
Éditée dans la superbe collection Signé du Lombard, cette première saga réalisée en solo par Olivier Grenson aurait également fait bonne figure au sein de celle des éditions Dupuis (Secrets), ayant pour thème de lourds secrets de famille. Si l’auteur choisit de s’appuyer sur ce conflit oublié, magistralement abordé dans le manhwa Massacre au pont de No Gun Ri, le véritable propos de ce diptyque est en effet une intrigue familiale à tiroirs riche en surprises.
Sur fond de cette tragédie sanglante qui fit près de trois millions de morts et qui divise encore aujourd’hui les deux Corées, Olivier Grenson invite donc à suivre la quête initiatique d’un jeune Américain hanté par des souvenirs douloureux. Au fil de flash-backs savamment dosés, il développe progressivement la psychologie de son personnage central : des douleurs d’antan à sa relation sentimentale délicate, en passant par l’incroyable destinée de son ancêtre. Faisant preuve d’une grande maîtrise narrative pour ses débuts en tant que scénariste, il prend son temps pour construire son récit et emmène habilement le lecteur vers un face-à-face riche en révélations entre deux êtres qui ont vécu des traumatismes importants. Si cette rencontre sur un lieu hautement symbolique, sorte de cicatrice témoignant d’une blessure pas totalement effacée, a des vertus psychanalytiques pour ce jeune homme qui parvient enfin à se libérer de son fardeau, elle permet également d’ouvrir une porte sur le pays le plus fermé au monde, libérant par la même occasion ce fort sentiment d’anti-américanisme endoctriné par le régime nord-coréen de Kim Jong-Il.
Loin d’être un débutant au niveau du dessin, Olivier Grenson (Carland Cross, La Femme accident, Niklos Koda) étale une nouvelle fois tout son talent artistique en distillant son graphisme plein de douceur dans l’enfer de la guerre. Si les planches dégagent à nouveau une élégance presque mélancolique, qui tranche admirablement avec la dureté de ce conflit abordé en toile de fond, ce sont véritablement les scènes oniriques somptueuses, issues de l’imaginaire foisonnant de Billy lorsqu’il était enfant, qui permettent au lecteur de s’évader d’une réalité qui ne fait que peu de cadeaux tout au long du récit.
Un voyage efficace et de toute beauté, qui a le mérite de raviver la mémoire collective !
Billy Summer a quitté San Francisco pour la Corée. Il va se confronter en huis clos à son grand-père, chacun portant de lourds secrets.
Cette BD nous fait plonger dans les méandres du destin, de la transmission.
Un être humain n'est pas seulement le résultat de ce qu'on lui a fait, mais également de ce qu'il fait de ce qu'on lui a fait. D'autre part le fait d'assumer ses démons, ses douleurs, ses peurs permet une certaine rédemption pour mieux continuer sa route!
Cette BD est très touchante, pleine d'humanisme et d'humilité. Le dessin et les couleurs utilisées par Grenson nous représentent bien la douceur de l'enfer.