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lors qu’elle vient juste de rentrer d’une mission pour le professeur Hidestone, Morphine est envoyée à White Valley pour y trouver le Smiling Fish, une chimère créée à partir de matière zéro par le célèbre et mystérieux Grand Sphynx. Accompagnée de Fear, une créature aux allures de loup, elle débarque dans une ville en effervescence, où des dizaines de chasseurs se sont rassemblés pour donner la chasse à l’étrange poisson. Qui sera le premier à l’attraper ? Malgré son jeune âge, Morphine possède un atout précieux : elle est capable de détecter infailliblement les productions du Grand Sphynx et de démasquer les imitations. Mais, durant sa quête, un danger inattendu la guette sous la forme de papillons de nuit dotés d’un œil sur l’abdomen… D’autres chimères ?
Derrière une couverture cartonnée illustrée d’un portrait de l’héroïne devant un mur décoré de papillons, façon trophées de chasse, Juliette Fournier, dont c’est le premier album, livre une histoire aux thèmes éternels. Ceux de la genèse, de la vie, de la mort, mais aussi de l’identité et des origines. En effet, si le chapitre d’ouverture de Morphine est axé sur la traque que doit mener le personnage central pour retrouver un être fabuleux, les deux autres s’intéressent eux à ces sujets essentiels qui constituent en fait le fond de l’intrigue. Par le biais d'une révélation concernant la "naissance" d'un des protagonistes, l’épilogue va même un peu plus loin en répondant à une question qui affleure au cours du récit : jusqu’où peut-on aller dans la création ?
Si la thématique est intéressante, le propos, lui, pèche, par moments, par manque d’envergure. Du fait peut-être d’une volonté de l’auteure d’offrir une histoire tout public, la trame et les enjeux restent assez simples. Ce qui ne gênera nullement un lectorat junior ou adolescent, mais laissera les plus grands sur leur faim. À noter aussi que ce désir d’en savoir plus se heurte au format même puisqu’aucune suite ne semble prévue et que les nombreuses interrogations soulevées pour étoffer l’intrigue resteront donc en suspens – quid du rôle de la Guilde des créateurs ? Quid de Hidestone et plus encore de Leoline ? Etc. À défaut d’obtenir des réponses, il est toujours possible d’apprécier le graphisme plutôt plaisant de Juliette Fournier. Influencé par le manga, son trait s’avère légèrement enfantin et colle ainsi parfaitement au récit. Son découpage extrêmement clair et assez aéré rend la lecture très fluide. Dommage, en revanche, qu’il n’y ait pas plus de décor, ce qui aurait pu étoffer certaines planches, parfois un peu vides.
Plutôt agréable à lire, Morphine est un album en demi-teinte qui laisse un goût de trop peu et qui, s'il satisfera sans doute les plus jeunes, restera un peu faible pour les autres.
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