Total Swarte

J oost Swarte fait partie du club très fermé des artistes reconnus mondialement. Son œuvre, à mi-chemin entre l'illustration et la BD pure, a influencé et continue d'influencer le 9e art et ça, depuis plus de quarante ans. Total Swarte regroupe l'intégralité des histoires de l'illustrateur hollandais.

Au début des années soixante-dix, alors que la bande dessinée, dans la continuité de Mai 68 connaît sa révolution personnelle et que les classiques se voient condamnés au bûcher, Swarte redécouvre la ligne claire et marche dans les pas d'Hergé. Alors que Jean Giraud travaille la matière en hachurant à outrance le papier, celui-là recherche le trait parfait qui résume tout. À cette simplicité apparente du trait hergéen, le dessinateur propose également une approche globale de la mise en page. En effet, chaque élément du récit (cases, planches, etc.) est pensé comme une pièce intrinsèque de la narration. L'auteur entretiendra et approfondira cette réflexion, très novatrice pour l'époque, tout au long de sa carrière. Ce n'est donc pas étonnant de voir un maître actuel du genre, Chris Ware, rendre hommage à l’artiste dans la préface de ce volume.

Si la forme peut tromper de par son aspect enfantin, le contenu, lui, est radicalement dans son époque. Sans jamais tomber dans la grivoiserie d'un Theo Van Den Boogaard (Léon la terreur), Swarte utilise largement le sexe, une violence très graphique et différents thèmes adultes (drogue, monde de l'art). Le décalage entre le style passe-partout des dessins et les sujets traités ajoute un niveau de lecture tout à fait jouissif à ces historiettes.

Seul le petit format de ce recueil gâche quelque peu le plaisir, surtout quand on sait qu'une partie de celui-ci est paru originellement dans la collection géante 30 x 40 des Éditions Futuropolis ! Heureusement, la sobriété toute voulue du trait offre une clarté incroyable à cet opus.

Total Swarte est indispensable au bédéphile féru de l'histoire de son art préféré. À lire et relire.