L
e regard du promeneur égaré en librairie sera d’abord attiré par les reflets argentés du livre, avant de s’arrêter sur l’effet tout en profondeur rendu par une carte transparente et striée apposée sur le dessus de la première de couverture. Effet de perspective garanti, alors qu’au premier plan une tête féminine à deux faces parait assoupie, des âmes en peine semblent hanter ses pensées dans le fond. Le titre, La fille perverse, celui de l’histoire qui ouvre ce recueil - pas la meilleure -, achève l’opération tape-à-l’œil. Que se cache-t-il réellement derrière ?
Junji Ito est connu des amateurs de manga tournés vers l’effroi, notamment pour sa série Spirale, concentrée sur des troubles obsessionnels contagieux relatifs à ladite forme, dont la maison d’édition Tonkam vient tout juste de proposer une réédition sous forme d’intégrale. Dans le présent album qui regroupe plusieurs récits réalisés entre 1989 et 1994, l’auteur reste dans son domaine de prédilection : l’horreur. S’il ne livre pas à chaque fois les clefs qui permettraient de comprendre ce qui se passe - c’est la règle -, il s'efforce néanmoins d'ancrer ce qu’il raconte dans le domaine du réel, dans le possible, laissant ainsi le lecteur prendre pied dans telle ou telle histoire, le plaçant ainsi en acteur selon le principe qui a si bien fonctionné pour le célèbre film de Daniel Myrick et Eduardo Sánchez, The Blair Witch Project. Le résultat est inégal, mais Souvenirs, mélange de Docteur Jekyll et Mister Hyde et du Portrait de Dorain Gray, et Au fond de la ruelle fonctionnent particulièrement bien et sortent du lot. Plus que de montrer, même si ça lui arrive, Junji Ito s’attache surtout à installer une atmosphère, à distiller ce qu’il faut de malaise pour faire monter la sauce crescendo. Force est de constater qu’il maîtrise les mécanismes du genre, ce qui n’a rien d’évident en bande dessinée, discipline qui ne dispose pas de tous les précieux outils du cinéma, et encore moins de l’obscurité de ses salles silencieuses.
La fille perverse est donc un ouvrage taillé pour ceux qui aiment le doux frisson de la peur, celle qu’il n’est pas possible de raisonner.
Après une vague au début des années 2000, il semblerait qu'il y ait un désintérêt pour l'oeuvre de Jinjo Ito certes parfois malsaine. L'ambiance est toujours aussi menaçante et c'est de l'horreur sans gore.
Dans ce recueil, ce sont sept histoires que l'auteur Junji Ito nous livre avec une couverture horrifique en 3D. Elles ont pour thème la vengeance, mais il s'agit là de ces vengeances qui se fomentent avec le temps ou s'étalent sur une longue période...
Les 7 récits sont les suivants:
- La Fille perverse
- La Maison au déserteur
- Le Cœur d'un père
- Souvenirs
- Au fond de la ruelle
- Scénario amoureux
- En terre
Comme à chaque fois, il y a des récits qui sont plus forts que d'autres comme par exemple la fille perverse qui donne son titre à l'oeuvre. La différence par rapport à ces anciennes oeuvres est qu'il n'y aura point de monstruosité. L'élément fantastique semble être gommé. C'est plutôt le comportement déroutant des personnages qui dérange. Bref, un titre qui permet de découvrir un auteur accompli qui maîtrise les mécanismes du genre.