"Jessica a été notre chance ! Battons-nous pour qu’elle devienne la chance de tous les new-yorkais !". Sur ces mots, Steven Providence donnait l’impulsion au groupe des 508 pour lancer Jessica Ruppert dans la course à la mairie de New-York. Huit années ont passé, les 508 se retrouvent pour fêter en direct la victoire de leur candidate. La fête tourne court, une gigantesque explosion les envoie tous ad patres. C’est ainsi que dans les grandes lignes se clôturait Le pouvoir des innocents.
Six mois plus tard, l’ennemi public numéro un n’est autre Joshua Patrick Logan, l’un des protagonistes majeurs du Pouvoir des innocents, accusé d’être l’auteur de cet attentat. Traqué et en cavale, il décide de se confronter à ceux qui l’accusent. Et pour cela, quoi de mieux que …
Une décennie après, utiliser certaines portes laissées entrouvertes par ce qui sera maintenant un premier cycle était tentant, d’autant que le public restait marqué par cette série qui, avec L’esprit de Warren (Brunschwig et Servain) Les enragés (Chauvel et Le Saëc) et Nuit noire (Chauvel et Lereculey), a symbolisé une ère particulièrement faste (années 90), qualitativement parlant, pour la collection Sang-Froid de la maison d’édition Delcourt. C’est chez Futuropolis nouvelle mouture que ça se passe, d’une part, avec la série Les enfants de Jessica lancée en mai dernier (Brunschwig, Hirn), et d’autre part, avec celle dont il est question ici : Car l’enfer est ici (Brunschwig, Hirn et Nouhaud). Cette dernière, proche dans le temps des événements tragiques sur lesquels se fermait Le pouvoir des innocents, s’inscrit naturellement dans sa continuité.
Organisé en chapitres, cet album commence fort, plantant clairement le décor de ce qui devrait constituer le cœur de l’intrigue à venir : un homme aux abois face au complot des puissants. Les balises d’un thriller politico-social sont posées et semblent en ordre de marche pour livrer un récit efficace, tant ce premier tome entre immédiatement dans le vif du sujet et ne s’éparpille pas outre mesure dans de multiples directions. Cette apparente simplicité, un certain sens du rythme, et une bonne cohérence d'ensemble rendent la lecture tout aussi fluide que prenante. Seule véritable ombre au tableau, une scène dispensable et proche du racolage sur la fin. Fort dommage, Le pouvoir des innocents n’avait pas eu à user de tels subterfuges pour cartonner. Au dessin, c’est David Nouhaud qui opère, sur une mise en scène de Laurent Hirn (c’est annoncé comme cela) dont il a su s’approprier le trait et la colorisation de manière assez impressionnante, ce qui contribue à l’immersion totale dans l’univers de la série mère.
Car l’enfer est ici est un titre qui claque, le contenu est à la hauteur et pose de solides bases pour la suite. À confirmer.
J’avais beaucoup aimé Le Pouvoir des innocents qui fut d’ailleurs une série que j’ai acquise au tout début pour constituer une collection de bande dessinée. Il faut dire que cette bd figurait dans les classements des meilleurs polars sur les sites consacrés au 9ème art. Bref, cela a été une de mes premières bd réellement adultes.
Une question se pose : la nécessité d’une suite était ‘elle franchement indispensable ? De mémoire, la série d’origine n’appelait pas vraiment à une continuation surtout au vu de la fin assez explosive. J’ai l’impression que l’auteur répond à une demande typiquement commerciale commandé par un éditeur. Et puis, même si c’était le cas, qu’importe si le produit répond à toutes les exigences de qualité !
Or, même des années après, on se replonge dans le bain de l’histoire de ce complot à visée politique. C’est bien écrit, bien agencé et ma foi, assez bien dessiné. Le talent est manifestement présent pour nous tenir en haleine. Je n’ai pas encore lu Les Enfants de Jessica qui marque le début d’une troisième période avant même que la seconde soit terminée. Là encore, quelque chose peut chiffonner et encore une fois, personnellement je n’ai rien contre une logique commerciale.
De toute façon, on dira que les lecteurs étaient en attente de savoir ce qu’il advient de l’innocent accusé d’un crime qu’il n’a pas commis. Il aurait fallu sans doute le faire plus tôt pour croire en la sincérité d’une telle démarche. Je dois bien avouer que le pari est plutôt réussi. La couverture par contre n’est pas très attirante. Ce titre m’a d’ailleurs totalement échappé lors de sa sortie. Voilà une séance de rattrapage assez salutaire.
La parution des trois cycles du Pouvoir des Innocents a été assez compliquée à suivre avec dès ce tome et le passage chez Futuropolis, la sortie des albums des cycles II et III en croisé. J’ai fait le choix de continuer chronologiquement avec donc ce début de cycle II dessiné par un très bon David Nouhaud. L’histoire débute quelques mois après la fin dramatique du premier cycle qui a vu l’élection de l’idéaliste Jessica Rupert à la mairie de New-York et l’incendie de la villa du boxeur Providence qui a traumatisé une grande partie de la population. Joshua Logan, en fuite avec sa femme est l’ennemi public numéro 1… jusqu’à ce qu’il se rende à la police pour dénoncer la conspiration des 508. Alors que tout l’édifice qui a permis l’élection de Rupert menace de s’effondrer l’avocat qui accepte de le défendre va mettre le nez dans un engrenage très dangereux… Avec le déroulé toujours aussi complexe de Brunschwig, cette suite nous place dans les meilleures conditions possible pour prolonger une intrigue qui s’annonce plus politique que jamais: le changement de dessinateur marque un saut graphique très appréciable. Le péché originel installé par le premier cycle laisse présager des réflexions profondes sur les buts du pouvoirs et les moyens mis en oeuvre et leurs justifications. Ce tome est une mise en bouche qui donne très envie de continuer cette très particulière saga.
Lire sur le blog:
https://etagereimaginaire.wordpress.com/2019/10/02/bd-et-vrac-12/
Lire une suite au 'pouvoir des innocents', quelques années à prés, est un pur bonheur. On retrouve instantanèment l'ambiance de cette histoire politique, trés bien menée, et dans le cas de cette suite trés bien dessinée...
Un grand moment, à ne pas manquer....
Après 9 ans d’attente, Luc Brunschwig et Laurent Hirn nous livrent, en l’espace de 3 mois, deux suites au "Pouvoir des Innocents".
"L’Enfer est ici" poursuit l’histoire 6 mois après le drame qui couta la vie à 508 personnes ! Mais avec Luc Brunschwig, les évidences ne sont pas de mise et derrière la quête de vérité de Joshua Logan, le lecteur se trouve confronté aux interrogations de Jessica de Ruppert et aux agissements de la mafia locale pour dissimuler certains évènements.
A travers l’arrestation de Joshua Logan et ses multiples rebondissements, Luc Brunschwig aborde – par petites touches successives - le fonctionnement de notre société. Il nous amène – à travers l’humanité de ses héros - à nous interroger sur les travers de nos comportements. La manipulation, l’honnêteté en politique, les lobbyings et ses dérives, l’extrémisme politique et sa récupération…. Autant de thèmes qui trouvent dans notre actualité quotidienne des échos pour le moins troublants. Il n’y a pas de prosélytisme chez Luc Brunschwig mais plutôt le souci de nous faire réfléchir à des thématiques qui semblent lui tenir à cœur ! Et ceci est fait en toute simplicité, sans effet de style mais avec les images justes et les cadrages adaptés. Sur ce dernier point, l’apport de Laurent Hirn est primordiale à l’album dans la mesure où son travail de mise en scène s’apparente étrangement à ce qu’il est possible de voir en salle ou à la TV : c’est propre, net, efficace et captivant !
Un bémol dans ce concert de louanges : le dessin pourtant plein de qualité de David Nouhaud qui se fond encore trop dans le graphisme des "Enfants de Jessica" … après l’avoir assimilé, il faut qu’il puisse s’en affranchir définitivement.
Quoiqu’il en soit un nouvel album puissant riche et équilibré… un bien bel album en fait !
Le scenario n'a rien envier à une superproduction americaine qui serait un blockbuster plutot tres réussi ce qui n'est pas toujours le cas. Le theme est interessant, le decoupage scenaristique dans l'air du temps, mais je reste un peu sur ma faim en me disant qu'il faut soit lire toute la serie en cours de création, je sais, mais surtout j'espere des surprises autres que de tres bons rebondissement, j'attends une vision encore plus carrée et neuve d'un systeme politique corrompu et connu de tous. Seuls les prochains albums permettront de le savoir.
La découverte de ce premier tome m'a procuré un superbe moment de lecture.
L'histoire commence très rapidement avec un Logan, que j'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir, en cavale mais qui fatigué (de même que sa femme) et désireux de prouver son innocence, va se mettre en danger en se livrant à la police. On est donc vite dans le vif du sujet.
Luc Brunschwig va, à sa manière habituelle, construire la suite de l'histoire en nous faisant suivre et découvrir différents protagonistes, toujours en prenant le temps de nous les dévoiler un peu humainement. Cette humanité se juxtapose à la brutalité des évènements engendrés par l'arrestation de Logan. On commence à découvrir les rouages de la justice pour vite comprendre que cette "justice" risque d'en avoir juste le nom devant le pouvoir des médias, la manipulation des foules et les manoeuvres politiques. S'ajoute à ce contexte la montée de mouvements extrémistes de tous bords, pour former un cocktail de haine, de peur et de tensions qui risque d'exploser à tout moment.
Le dessin de David Nouhaud accompagne idéalement cette histoire, sans esbroufe, avec une belle capacité à rendre les ambiances et faire ressortir les émotions des personnages, bien aidé par des couleurs douces et discrètes.
Quel superbe travail!