L
ouis est un jeune garçon solitaire dont les origines eurasiennes sont souvent le sujet de moqueries de la part de ses camarades de classe. Vivant seul avec sa mère, il ne sait quasiment rien de son père et aimerait bien percer le secret de cette absence paternelle. Le sujet étant classé tabou, il laisse libre cours à son imagination pour s’inventer des racines… jusqu’au jour où des amis cambodgiens viennent trouver refuge chez eux. C’est pour lui l’occasion de vérifier quelques indices récoltés au fil des années et d’en apprendre plus sur ses origines.
Indirectement touchée par la guerre civile déclenchée par les Khmers Rouges à la fin des années soixante, Loo Hui Phang s’inspire donc de l’histoire de sa propre famille pour livrer un diptyque qui aborde cette page sombre de l’Histoire du Cambodge. Cette mise en place invite à suivre le malaise d’un enfant dépourvu de repères essentiels et quotidiennement victime d’une différence que sa mère refuse d’expliquer. Se heurtant constamment au silence qui entoure ce lourd secret familial, il est obligé de trouver lui-même réponse à ses nombreuses interrogations. Se servant d’un canari comme principal interlocuteur, Louis partage difficilement ses angoisses et ses peines, tout en développant un monde onirique censé combler le vide laissé par le mystère qui entoure son père. Si le voile concernant ses origines ne se lève que très lentement, c’est avec beaucoup de justesse que l’auteur décrit la souffrance de l’enfant. Passant régulièrement du rêve à la réalité, la narration puise sa force dans les non-dits qui accompagnent le mal-être de Louis.
La mise en images très sobre de Michaël Sterckeman conforte le ton intimiste du récit. Un dessin noir et blanc assez minimaliste qui s’inscrit totalement au service du scénario. L’ancrage historique cambodgien n’étant qu’effleuré lors de cette mise en bouche, la conclusion de cette saga est donc attendue avec grand intérêt.
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