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Q ue de tracas ! Où placer la tente ? Que fait le traiteur ? Heureusement que les massifs sont bien fleuris. Il ne faut rien laisser au hasard, si on veut que la garden party soit une réussite. Et ne viens pas me parler pas de ce pauvre Monsieur Scott qui vient de mourir dans cet affreux accident ou de ces malheureux chômeurs, enfin, au moins, la météo s'annonce clémente.

Avec La Garden Party, Thierry Bouüaert s’attaque à une adaptation d’une nouvelle de l’écrivaine moderniste Katherine Mansfield (1888 – 1923). Cette dernière, moins célèbre que son illustre contemporaine Virginia Woolf, jouit néanmoins d’une très grande reconnaissance dans le monde des lettres anglo-saxonnes. A l'exception de la transposition du récit à l'époque actuelle, Bouüaert a très bien su conserver l’essence même de ce texte paru il y a près d'un siècle. Il a également parfaitement maintenu la délicate structure narrative de l’auteure néo-zélandaise. En effet, le scénario repose sur un décalage entre la réalité rencontrée par les protagonistes et leur perception de celle-ci. Si les cases montrent une situation, souvent l’esprit vagabonde. Au lieu d’une ligne narrative unique, le lecteur se trouve en présence d’une « zone » narrative, où une multitude d’éléments (pensées, actions, « impressions ») se côtoient mutuellement. Difficile à suivre ? Non, même si les premières pages peuvent dérouter, très rapidement la lecture devient un espèce de jeu de piste passionnant à suivre.

Les amateurs de cinéma remarqueront que La Garden Party fonctionne sur le même principe d’alternance que The Hours, film adaptant, faut-il le rappeler, des nouvelles de Virginia Woolf. La narration passe, sans avertissement, du récit principal à des rappels biographiques à propos de l’auteure. Ces sauts abrupts reprennent la volonté de rupture stylistique voulue par les Modernistes.

Au-delà de la forme, le fond social et intimiste du scénario est également très bien raconté. La Garden Party permet à l’auteur du Style Catherine d’explorer les thèmes humains qui lui sont chers. La fragile Laura, jeune fille tout juste sortie de l’enfance, commence à percevoir la réalité et les hypocrisies de la société. D’un côté, l’opulente grande bourgeoisie, dont elle est issue et, de l’autre, les gens modestes, les pauvres qui se contenterons des miettes de la fête. Certains se tracassent à propos d’un massif de roses, d’autres se demandent comment faire pour boucler la fin du mois. Le travail de Bouüaert est admirable, même si, par moment, certaines répétitions inutiles alourdissent la narration.

Graphiquement, le dessinateur joue également sur les styles pour transcrire le ton unique de Mansfield. Les décors, au rendu « croquis sur le vif », sont néanmoins très précis et remplis de vie. Quant aux personnages, leur « finition » au lavis les rend un peu flous, comme vibrants. La juxtaposition entre les deux techniques permet une atmosphère unique. Les immeubles, les routes, la pierre sont solides, immuables, alors que les humains respirent, scintillent presque. L’usage, intégral cette fois, du lavis pour les rappels biographiques à propos de Katherine Mansfield donne à ces passages un rendu suranné tout à fait adapté.

Une œuvre exigeante mais, néanmoins, facile d’accès, La Garden Party est une réussite à tous les points de vue.

Par A. Perroud
Moyenne des chroniqueurs
6.7

Informations sur l'album

La garden Party

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L'avis des visiteurs

    Erik67 Le 03/09/2021 à 09:55:28

    J'ai trouvé la lecture de cette bande dessinée bien ennuyeuse alors que les mots de l'auteur sur la préface ainsi que ses sources biographiques laissaient espérer de prime abord quelque chose de plus intéressant. J'ai quand même tenu jusqu'à la fin pour savoir qu'est-ce qu'était véritablement l'objectif de cette œuvre.

    La réponse est que pendant que les riches s'amusent impunément dans des gardens party, à côté de cela, il y a une multitude de gens pauvres qui vivent des deuils incommensurables. Il y a quelquefois des moments où il faut s'arrêter de faire la fête pour respecter les malheurs d'autrui. Voilà pour la belle leçon de morale.

    La soixantaine de page pour illustrer cette idée tout simple et louable expliquera sans doute l'ennui mortel du lecteur. J'avoue qu'il y a d'autres manières d'exploiter des idées. Juste encore un mot pour dire que le dessin ne m'a pas plu car trop brouillon. Je mets tout de même 2 étoiles car je partage sans doute les mêmes valeurs, mais j'aurais voulu les voir exprimer autrement.