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ne jeune fille qui ne se réveille plus, une autre – en fait la sœur jumelle de la première – qui s’ennuie fermement, une vieille dame qui a de la ressource, un braqueur qui manque manifestement d’habitude et un vieux chercheur qui se perd en considérations fumeuses, le tout sur fond de trou noir créé par un accélérateur de particules.
Présentée comme cela, évidemment, la scène a de quoi surprendre. Néanmoins, le duo Wazem/Tirabosco ayant déjà fait ses preuves dans le genre onirique et franchement décalé, c’est avec résolution que le lecteur curieux se plongera dans leur univers teinté de bleu. L’expérience est intéressante, mais elle s’avère un peu vaine. Tandis que les auteurs parvenaient dans La fin du monde, leur précédente réalisation commune, à insuffler une inébranlable cohérence à leur album, ils peinent ici à dessiner une trame claire au milieu de leurs diverses élucubrations.
Le ton de l’histoire semble aseptisé, ne suscitant que peu d’émotions et laissant largement indifférent au sort des différents acteurs. Ainsi, l’étrange mélange d’explications scientifiques et d’éléments fantastiques, au lieu de fasciner, détonne à chaque instant et paraît extrêmement artificiel, feignant d’apporter une solution au problème à l’origine du récit et ne parvenant qu’à enfoncer celui-ci dans l’absurde.
Cette déconvenue est d’autant plus regrettable que Tirabosco, comme à son habitude, émerveille par un dessin qui n’appartient qu’à lui, granuleux et tout en rondeur. Il s’accommode parfaitement du rythme lent imposé par le scénario, et régale par ses plans larges empreints de solitude et de mélancolie. Apportant un soin particulier aux personnages, c’est lui, plutôt qu’une intrigue un peu terne, qui leur confère une personnalité et les rend attachants. De même, sa mise en couleurs, qui se situe quelque part entre le noir et le bleu, contribue à la grande beauté graphique du livre.
Il est toujours intéressant et louable de voir des auteurs prendre des risques et suivre leur imagination, quitte se perdre en cours de route. C’est ce qui se passe ici, l’histoire ne parvenant pas à conserver ce minimum de logique qui lui conférerait une plus grande crédibilité. Cette légère déception ne suffira toutefois pas pour entamer la confiance du public habituel de ces deux auteurs, lequel devrait être disposé à les suivre encore et toujours sur leurs chemins de traverse. À jamais, la curiosité et l’audace l’emporteront, même au prix de quelques accrocs au passage de l’un ou l’autre album.
Lire la chronique de La fin du monde
Un ouvrage déstabilisant mais offrant de beaux morceaux de bravoures graphiques et scénaristiques. Pas mal du tout.
Cette histoire de fausses jumelles ou de rencontre de deux réalités, je ne sais plus, m'a laissé un goût amer. Le trait est certes envoûtant mais cela ne suffit pas pour me convaincre. Pourtant, j'avais bien aimé « La fin du monde » par les mêmes auteurs. On dirait qu'ils exploitent le filon au maximum.
Cependant, après la montée des eaux, c'est le tour de l'expérience humaine suite à la mise en service de l'accélérateur de particules du CERN à l’origine d'un trou noir qui absorbe toute la lumière environnante ! On n'y croit plus !
Les auteurs n'ont pas su faire preuve d'originalité car ils utilisent quasiment le même procédé : on en dit le moins possible sur le phénomène étrange pour laisser la place à une certaine atmosphère où ils vont concentrer le paquet. Là encore, cela ne le fait plus !