L
es petits boulots et les galères quotidiennes entament à peine le moral des deux Frenchies, Thibault et Alex, partis à la conquête de Londres. D’autant que le festival de Reading, clou de leur séjour, approche à grands pas. Alors, au diable la gale attrapée dans un squat sordide, oubliées la descente de flic lors d’une fête clandestine et la nuit au poste pour avoir collé des affiches pas très catholiques sur les vitres de cabines téléphoniques. Pas très catholiques ? Tout le contraire d’Andrew, Irlandais de souche et proche de l’IRA, dont le produit de ses activités illicites sert à financer l’acquisition d’armes envoyées à Belfast. Puis il y a Emma, junkie et revendeuse de drogue qui débarque également dans la capitale anglaise pour une vie meilleure, qu’on lui avait promise. Gonflés d’idéaux, tous vont devoir affronter le revers de la médaille, bien réel celui-ci, mais aussi terriblement cruel.
London Calling pourrait sonner comme une bonne leçon de morale, du genre : « Ah ! Vous vouliez partir à Londres écouter de la musique ? Trouver un job sympa aussi facilement qu’un cachet d’ecsta ? Revoir des potes d’Erasmus qui vont vous accueillir les bras ouverts ? Ce n’est pas ça la vie les gars ! Je vous aurai prévenus, vous allez en baver ! ». Il y a un peu de ça, bien sûr, passage obligé à moins de tomber dans les écueils d’un récit mièvre, terne et sans saveur. Néanmoins, ce qui donne la force à l’histoire ne réside pas seulement dans le destin de deux gamins, tout juste sortis de l’adolescence, partis la fleur sans le fusil de l’autre côte de la Manche, mais aussi dans l’environnement qu’ils découvrent à leur arrivée : un contexte politique et social encore marqué par l’empreinte du thatchérisme, une lutte fratricide et déchirante entre papistes et orangistes, le hooliganisme, la prostitution, la drogue… Autant de sujets, graves, qui ont effleuré Thibault et Alex sans jamais les atteindre jusqu'alors, avant de les rattraper dans un troisième tome faisant office de bouquet final. Les pièces du puzzle imaginé par Sylvain Runberg s’assemblent doucement, sans doute pour mieux préparer au drame qui s’annonce, inéluctable. Les différents événements relatés dans les deux albums précédents prennent ici tout leur sens, dans une narration, certes plus linéaire, mais aussi plus dynamique. Le scénario se révèle très efficace, tout comme le dessin de Phicil sans fioriture, avec des décors a minima, pour ne se consacrer presque exclusivement qu’aux personnages.
Les dernières pages sont peut-être un peu vite expédiées et peuvent laisser quelques lecteurs sur leur faim, mais elles ne doivent pas occulter les qualités d’une série menée tambours battants, du début, jusqu’au Clash de fin.
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Par L. Gianati
Après avoir passé le temps des souvenirs, de ces bons vieux groupes rock, les deux derniers tomes nous aménent dans une histoire qui se complique pour nos deux frenchies sur fond d'hoolignas, drogues, IRA...
Trés bien ficelé, à lire en écoutant un bon Sonic Youth...