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n homme se réveille à l’hôpital, se rappelant vaguement un accident de voiture mais n’ayant plus d’autre souvenir. Pourtant, il sent bien que quelque chose ne tourne pas rond, qu'on le maintient volontairement sous calmants. Quand il se débarrasse enfin des tubes qui l’entourent, sa seule piste s’appelle Evelyn Flaumel. Sa sœur. En fait, celle-ci se prénomme Fiona et lui révèle au cours d’un jeu de questions-réponses son identité et ses origines. Corwin, prince d’Ambre, peu aimé de sa nombreuse fratrie, entend bien en découvrir plus. C'est pour ça qu'il accepte d’aider Random, ce frère qui vient de l'appeler en lui demandant de l'aide. Mais le nouveau venu n’arrive pas seul. Poursuivi par des créatures des ténèbres, il entraîne son aîné dans un univers dangereux, où foisonnent les ennemis et où les enjeux sont complexes. S’il veut s’en sortir, Corwin doit d’abord retrouver la mémoire et pour cela atteindre Rebma, une des ombres d’Ambre, afin d’en traverser la marelle. Encore faut-il survivre à la route qui y mène…
Adapter un roman universellement connu est un véritable défi, qui échoue souvent sur l’écueil acéré du jugement de fans peu enclins aux concessions. Alors, quand des auteurs s’attaquent au chef-d’œuvre de Roger Zelazny, référence de la littérature fantastique, le pari est risqué et les attentes nombreuses, teintées d’une crainte justifiée des lecteurs de voir leur livre préféré dénaturé ou retranscrit bien différemment de ce que leur imagination laissait entrevoir. Ce premier tome des Princes d’Ambre rejoint le lot des versions qui risquent d’en décevoir beaucoup. Pourtant, Nicolas Jarry fournit un travail fidèle sur le début de cette saga, restituant bien la singularité des premières pages, nageant dans un flou lié inextricablement à l’amnésie du héros. Il parvient également à présenter petit à petit les protagonistes, les forces en jeux, et laisse entrevoir le monde d’Ambre ainsi que ses particularités. Et s’il faut attendre le dernier tiers de l’album pour que l’action prenne le pas sur les introspections en voix-off – qui suis-je, d’où viens-je, où vais-je ? – et les dialogues verbeux, force est de constater que le scénariste a su ménager la montée en puissance du récit, partant des tréfonds d’une mémoire disparue pour en montrer la reconquête à travers un subtil jeu d’allusions et de non-dits qui posent déjà le personnage de Corwin, usant du vague pour connaître le vrai. Quitte à laisser l’impression que le propos est trop lent ou incomplet.
Mais là où le bât blesse et risque de faire hurler les amateurs de la version originelle, c’est en matière de traitement graphique. Ceux qui s’attendent à retrouver la finesse élégante et colorée qui les avaient enchantés dans l’Univers d’Ambre ou le Tarot, signés Florence Magnin, ont tout intérêt à passer leur chemin. De même que ceux qui auront été alléchés par la couverture d’Alberto Varanda, sombre, sobre et légèrement floutée. Le graphisme de Benoît Dullac est assez éloigné de l’un comme de l’autre. Réaliste, bien que non dépourvu de quelques erreurs de proportions par endroit, il colle néanmoins aux prémices de l’histoire, ancrées dans une Amérique contemporaine, laissant flotter l’atmosphère des films noirs. Accompagné des teintes froides d’Anouk Perusse-Bell, il se révèle cendreux, terreux, comme si les couleurs avaient fui à l’instar des souvenirs de Corwin. Malheureusement, ces nuances pleines de grisailles, même de jour, n’inclinent guère à se laisser happer, glissant plutôt en surface dans l’espoir d’une explosion qui n’arrive pas. Hélas. Car la dernière planche représentant enfin Ambre s’avère elle aussi un rien amère… faute de surprendre et d’enthousiasmer. N’était-ce pourtant pas censé être le clou de cet épisode ?
Difficile de ne pas ressortir perplexe de cette lecture. La fidélité du scénario fait plaisir, mais ne masque pas la déception ressentie face au dessin. Cet Ombre-Terre pose une nouvelle fois la question : faut-il tout ignorer du texte original pour apprécier une adaptation ? Et celle-ci peut-elle finir par trouver grâce auprès des plus exigeants ? Aux auteurs de le prouver !
Les dessins de Dellac sont tellement mauvais... C'est à peine digne d'être publié dans un fanzine....
Je suppose que l'éditeur ne voulait pas payer pour un dessinateur doté d'un peu de talent, en espérant que les amateurs de la série de Zelazny achèteraient ça les yeux fermés.
Allez lire les romans, et faites-vous votre propre visuel dans votre tête. Ça sera 1000 fois mieux que cette bouse infecte.
Dommage qu'il n'y ait pas la possibilité de mettre une note négative. Ce truc le mériterait bien...