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atrick, tenancier d’un magasin de farces et attrapes, cultive sa dépression avec un malin plaisir. Son frère, celui qui a « réussi », passe lui remonter le moral - un coup pour rien. Et la vie de suivre son cours.
Comme à son habitude, excepté pour Ibicus qui se situe un peu à part, Rabaté place son curseur quelque part entre regard amusé et empathie à l’endroit de ses personnages et de leur environnement. Ainsi, c’est tout en finesse qu’il parvient à se faufiler entre les pièges du misérabilisme et de l’humour troupier. Le petit rien tout neuf avec un ventre jaune est construit dans le quelconque, une matière dans laquelle il aime à façonner ses histoires sans user de faux-semblant. Son dessin, sans excès de style, participe pour beaucoup à ce juste milieu, ne cherchant pas plus à magnifier qu’à assombrir la réalité, et se gardant bien de la contourner. Cette sobriété est renforcée par les belles couleurs aux tons pastel d’Isabelle Merlet qui, tout en confirmant l’aspect sans éclat du récit, lui confèrent un caractère profondément paisible. Alors, quand le rideau tombe, il convient d’accepter la nature tranquille de la « non-chute » qui s’inscrit, ni plus, ni moins, dans la droite ligne de ce qui a précédé.
Rabaté s’est fait plaisir avec le titre, mais sans doute encore davantage en l’associant à la première case. Quand l’absurde rencontre le simple, une dimension qui, avec le temps, gagne du terrain dans ses albums. Cette évolution semble scellée par un hommage sous forme de clins d’œil à l’œuvre de Magritte, avec, au-delà des posters qui couvrent l’intérieur de Patrick et une interprétation très libre de La philosophie dans le boudoir, une légèreté générale qui se dégage de l’ensemble. Rabaté évite toute surcharge inutile - rien de pédant dans son approche - et procède par petites touches qui se fondent dans le décor pour celui qui n’y prend garde. Ainsi, de manière anodine et sans avoir l’air d’y toucher, il donne à son récit déprimé un paradoxal soupçon de gaité. Le texte est à l’avenant, un savant dosage de bons mots et de bon sens, tout en mesure, porté par des acteurs en grande forme. Enfin, une mention spéciale doit être décernée à la costumière qui s’est pliée en quatre pour répondre aux désirs les plus fous de ce metteur en scène exigeant.
L’osmose entre tous les éléments est trouvée : Rabaté jongle avec l’insignifiant, et faisant preuve d'une dextérité qui s’affine avec le temps, il compose une narration remarquable. Le petit rien tout neuf avec un ventre jaune témoigne de cette possibilité de faire des albums d’où se dégagent magie et poésie, tout en restant ancré dans le commun et sans trahir l’humain.
Ce n'est pas l'histoire, ici somme toute banale, mais les personnages qui rendent ce livre attachant.Pascal Rabaté a le don de décrire la vie quotidienne et de nous faire découvrir des personnages qui nous font du bien même si l'histoire est tendre et un fond mélancolique.
Le dessin de Pascal Rabaté depuis cette BD a fait de grands progrès de même que la mis en case qui est devenue moins académique.
J'ai pris un réel plaisir à lire cette BD, même si je préfère grandement "Alexandrin....". On peut ainsi toucher du doigt la progression de ce véritable auteur.
Deuxième BD de Rabaté que je lis après le très bon "Les petits ruisseaux" et je suis une nouvelle fois conquis.
Le personnage de Patrick, gérant d'un magasin de farces et attrapes, est touchant et certaines séquences m'ont parlé. Il y a un petit côté poétique qui se marie bien à cette histoire de rencontre, c'est léger et la psychologie des personnages est assez fouillée.
La fin nous laisse avec un gros point d'interrogation (reconquête ou indifférence à l'autre?), c'est pas mal, ça fait réfléchir....
Le dessin n'est pas très attirant au premier abord, mais dévoile toute sa magie lors de la lecture (expressions, grimaces des visages, attitudes corporelles....)
Un bon album à découvrir dans le genre "chronique sociale"
Une chronique comme seul Rabaté est capable d'en concocter. Ce n'est pas le meilleure de ses oeuvres selon moi mais comme c'est toujours un plaisir de le retrouver avec ses personnages banals mais divertissants...
Ici, touchant au thème de la dépression et du je m'en-foutisme qui se colle avec, il invente des situations où la rédemption peut se situer à chaque chemin.
Tranquille comme un fleuve d'été mais efficace comme des bleuets lors d'un pique-nique.
Une tranche de vie banale, celle de Patrick qui cultive avec une certain amour et humour sa dépression. Face à lui son frangin dynamique et sentencieux représente celui qui réussit. Patrick va malgré tout rencontrer l'amour de façon surprenante pour lui comme pour nous. mais voilà, dans la vie rien n'est simple et l'idyle se heurte à la réalité du quotidien... Les planches traduisent bien le côté implacable du quotidien par une représentation parfois minimaliste des protagonistes et de leurs expressions. Une histoire émouvante...