L
a fin de l’adolescence et le passage à l’âge adulte sont généralement marqués par une crise existentielle plus ou moins profonde suivant les individus. Pour Vincent Carl Santini, cette période fut plutôt mouvementée : absorptions de substances illicites en tous genres, nuits au poste de police pour détention de drogue, un parfait je-m’en-foutisme pendant les heures de cours… et le début d’une très longue psychanalyse. Il faut dire, pour sa défense, que l’environnement dans lequel il vivait n’était pas très propice à une jeunesse dorée : Brooklyn, dans les années 70, n’est pas à proprement parler le lieu idéal pour un gamin de 16 ans. Mais que dire également de sa famille : une mère juive, névrosée et dépressive, un père italien, colérique et hypocondriaque mais aussi un oncle mafieux et lubrique et des tantes impressionnantes de méchanceté. Bienvenue dans le monde déjanté du très psychédélique Brooklyn Dreams.
Les deux prénoms accolés à Santini, Vincent et Carl, ne sont pas anodins. Ils sont le triste résultat d’une énième dispute de parents, incapables de s’accorder mais aussi le stigmate d’une enfance chahutée qui laissera, plus tard, des traces indélébiles. L’album s’ouvre sur un homme, la quarantaine, assis dans un fauteuil, dont les premiers mots sont : « Je vais vous raconter une histoire qui m’est arrivée quand j’étais au lycée, en terminale ». Pourtant, combien de digressions faudra-t-il au narrateur pour, enfin, dévoiler son incroyable secret… Le reste de l’ouvrage est constitué de « petits mensonges qui, avec un peu de chance, pourraient se révéler vrais » : des anecdotes traitant en vrac de l’adoption d’un chien, Bilbo, élevé au rang d’ange gardien, des crises de folie et d’automutilation d’une mère, de l’enterrement houleux d’un oncle ou des délires nés de la prise de psychotropes.
Ces bouts de vie, en apparence sans queue ni tête, s’enchaînent les uns après les autres sans jamais susciter l’ennui ou la confusion. Les « rouages dans les rouages » se mettent lentement en place, les expériences, bonnes ou mauvaises, sont autant de chemins, parfois tortueux, qui vont mener, petit à petit, l’alter ego de J.M. DeMatteis à découvrir la clé de son existence. Car Brooklyn Dreams, aussi étrange que cela puisse paraître, n’est autre qu’une autobiographie mais aussi une analyse dont le lecteur en est, finalement, le principal thérapeute. Il s’en dégage une fureur narrative jubilatoire accentuée par un dessin en noir et blanc qui, lui aussi, semble frappé par la démence. A un trait sobre et réaliste succèdent, sans transition, des personnages issus d’un dessin animé. Quelques caricatures illustrant la mère en vieille mégère hallucinée ou le père en King-Kong monstrueux viennent également agrémenter quelques planches parsemées de représentations allégoriques.
Brooklyn Dreams est la réédition, chez Futuropolis, d’une première publication parue aux Etats-Unis en 1994. L’album, le seul et l’unique du dessinateur, Glenn Barr, fait partie de ses ovnis, qui de temps en temps, apparaissent dans l’univers de la bande dessinée. A ne manquer évidemment sous aucun prétexte.
ouais ... pour amateurs uniquement ...
Car à moins d'être subjugué d'apprendre le jour ou DeMatteis a enfilé son premier short et de connaitre le nom de sa cousine paternelle issue de germain et la race de son chien, je ne comprends pas l'intérêt de cette bd.
Certes, on peut rétorquer que cette dernière est autobiographique, et que ces détails insignifiants ont une place légitime. Mais dans le cas présent il n'y a QUE ça. Ici, je trouve la démarche un peu ... prétentieuse, car les faits relatés sont dénués d'intérêt (oui j'insiste, je me répète)
Additionné au fait que l'auteur s'adresse directement au lecteur. Je ne suis généralement pas hostile à ce procédé, mais en l'occurrence, l'auteur le fait de manière maladroite, lourde et pompeuse.
Pour les dessins, en revanche : rien à redire. J'ai même apprécié que le dessinateur change de style de case en cases en fonction du contexte.
Je laisse la place à d'autres, pour une critique méliorative.