L
’heure n’est pas aux réjouissances après la mort d’Henri Cazenac. Pourtant, l’occasion est trop belle de fêter les retrouvailles avec Fabien d’une part, mais surtout avec Louise, qu’Etienne n’a pas revue depuis leur tragique séparation. Quelques instants privilégiés qui sonnent comme un répit avant l’ultime combat chamanique que doivent se livrer l’ours et le loup. Car Wolf, alias Von Strauffenberg, n’est pas mort. Il jette ses dernières forces dans la résurrection du Reich après la défaite allemande de la première guerre mondiale. Surtout, il n’a pas oublié le revers que lui a fait subir, quelques années plutôt, le jeune Etienne Cazenac.
La dernière croix marque la fin d’un cycle, celui de l’aigle, tout en mettant un point final à une série entamée en 1999. Tout n’a pas été parfait dans les dix albums de la saga, loin s’en faut. L’idée de mêler chamanisme et espionnage, sous fond de conflit planétaire, était pourtant originale. Pourtant, l’intérêt s’est peu à peu étiolé au fil des aventures des Cazenac, la faute peut-être à une trame principale trop délayée ou à quelques aspects de l’histoire, avec ou sans grand « h », parfois tirés par les cheveux.
L’ultime tome ne fait pas exception à la règle. Le lieu, les Etats-Unis, et l’époque de l’entre-deux-guerres sont les prétextes idéaux pour resservir une fois de plus les thèmes liés à la prohibition, aux prémices du jeudi noir ou au complot fomenté par les nostalgiques de la toute-puissance allemande. L’origine du Mal est incarnée par un seul homme, Von Strauffenberg, et seul Etienne Cazenac peut mettre un terme à ses agissements. Voilà pour l’essentiel. On en viendrait presque à oublier que ce dernier album devait lever le voile sur bon nombre de mystères entourant la croix, que son titre évocateur laissait penser à une confrontation sanglante avec un aigle incarné par une jeune indienne. Pourtant, Nahima, présentée comme un personnage-clé de cette fin de cycle, ne jouera finalement que les seconds rôles, simple témoin des explications plutôt expéditives de son grand-père. Quant à Louise et Victorien, croisant de nouveau la vie d’Etienne, ils n’apportent pas l’émotion qui aurait dû découler de la réapparition d’un amour de jeunesse ou de la découverte d’un fils qu’il n’a jamais connu.
La collaboration au dessin de Siro, depuis le neuvième tome, n’a pas vraiment apporté de valeur ajoutée au travail remarquable d’Eric Stalner, même si l’ensemble demeure de très bonne facture. Reste une dernière case, énigmatique, qui, à défaut de clôturer définitivement la série, laisse au contraire la porte ouverte à une suite éventuelle. Pour l’heure, le lecteur doit se contenter d’une fin, ce qui est déjà en soi une sacrée performance, même si elle ne satisfera certainement pas les fidèles de la première heure.
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Est-ce enfin réellement le dénouement de la série avec le regroupement des quatre croix et la dernière bataille avec le loup ? On peut en douter vu la fin qui nous laisse à la porte de l'inconnu. Mais les derniers rebondissements ne relancent pas réellement l'intérêt même s'ils apportent un certain nombre de réponses. Et un nouveau dessinateur est crédité au côté de Stalner, ce qui confirme que les dessins ne sont plus tout à fait les mêmes, même s'ils restent de bonne facture.
Le début de cette série était très bon, la fin est seulement pas mal.