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Animal'z

23/04/2009 13517 visiteurs 6.1/10 (9 notes)

L e "Coup de sang" a laissé la Terre meurtrie, totalement polluée et au climat déréglé. Seules les voies maritimes, pourtant dangereuses, restent praticables. La survie des hommes est devenue aléatoire et l'eau potable s'est transformée en un trésor plus que convoité. Dans ce chaos, Franck Bacon, Ana, Lester, Ferdinand et Kim Owles tentent de rejoindre un Eldorado improbable via le détroit 17, sous forme humaine ou de dauphin. Hybridation devenue accessible pour les plus riches seulement et constitue une échappatoire adapté à l'évolution de la planète. Les moins chanceux doivent se contenter d'une survie parfois synonyme des pires atrocités.

Après une décennie passée à réveiller le monstre, Enki Bilal a décidé de tout miser sur les hommes plutôt que sur les organisations. Exit donc la politique, les Etats (et les stocks). Seuls les vestiges de ceux-ci existent sous formes de débris désolants et dangereux, héritage tragique d'une catastrophe inéluctable pour les plus pessimistes (ou réalistes selon l'auteur). Les personnages éclipsent donc l'action, reléguée à une juste place au second plan. Englués dans le marasme des conséquences climatiques de l'irresponsabilité humaine, les protagonistes profitent de manipulations génétiques qui, pour une fois, ne semblent pas être seulement négatives. Issue bénéfique et salvatrice, l'hybridation permet une régénération de l'être via une transformation en mammifère marin qui, au passage, dote le sujet de sens surdéveloppés. Métaphore de l'apport positif et indispensable de l'animal à la race humaine ou simple artefact onirique, l'inventivité de la manœuvre a l'avantage d'offrir de magnifiques tableaux où l'homme ne fait plus qu'un avec son alter ego marin.

Réalisé rapidement (95 pages en une année), ANIMAL'Z ne souffre pas du syndrome de la précipitation. Marque de fabrique du dessinateur depuis des lustres, le graphisme sombre, triste et dégoulinant de rouille est beaucoup plus dépouillé qu'à son habitude. Minimalisme, tant au niveau des couleurs que des décors, qui rime ici avec beauté. Les brumes de pollution et la neige rendent l'exercice de "dissimulation" des détails plus aisé et plus poétique également. Le gris est la couleur idéale pour l'ambiance post-apocalyptique, pour le "sentimentalisme" et la nostalgie. Le ton sobre, rythmé par les nombreuses citations (Nietzsche, Camus, Théophile Gautier, Shakespeare, Flaubert, ...), décriées par certains comme de l'intellectualisme pédant, teinte le tout d'une langueur (pas monotone pour un sou) qui tranche agréablement avec l'habituel tempo des séries du genre. Les quelques touches de rouge soulignent le côté dramatique nécessaire à la crédibilisation d'un récit parsemé de violence suggérée.

Reste le mystère de ce couple improbable ornant la couverture et repris au fil de l'album sous forme de quatre vignettes représentant différents stades de leurs relations. Sans lien apparent avec l'histoire, est-ce une symbolique d'un changement de comportement de l'homme envers l'animal et un message écologique pour les générations futures? Ou un simple exercice graphique au sens énigmatique et laissé à la libre interprétation de chacun ? Les propos de l'auteur font pencher la balance pour la première solution mais sait-on jamais…

Fin dosage entre promenades/poursuites nonchalantes à dos d'équidés, discussions sur le pont au clair de lune (brouillée par les émanations radioactives) et décès prématurés (de salauds qui le méritent bien), ANIMAL'Z est un album qui pourra servir d'introduction aux autres œuvres plus rudes et austères d'Enki Bilal. Pour les autres, se laisser porter par l'ambiance sans trop chercher à comprendre est sans doute la meilleure solution pour trouver du plaisir à la lecture.

Par T. Pinet
Moyenne des chroniqueurs
6.1

Informations sur l'album

Animal'z

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Note: 3.2/5 (136 votes)

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L'avis des visiteurs

    BriusOlivier Le 21/03/2022 à 11:40:09

    J'adore Bilal.
    Pourtant...
    Graphiquement c'est superbe, mais déjà fait (par Bilal lui-même, puisqu'il est inimitable).
    Le gros point noir, c'est la narration, qui est pour le moins absconse. Au fil des planches, on se perd, on a presque l'impression qu'ils n'ont dessiné ou écrit qu'une planche sur cinq...
    Le petit point noir, je dirais, c'est la fausse philosophie. Aucun intérêt ici. Si vous voulez réfléchir : il y a mieux fait et plus profond...
    Si vous êtes fan de Bilal : ceci n'ajoutera rien...
    Pour découvrir Bilal : commencez ailleurs
    Bref, j'adore Bilal, mais celui-ci m'est tombé des mains...

    Erik67 Le 04/09/2021 à 10:37:58

    Toujours la même chose... Lire un Bilal est un véritable plaisir pour les yeux. Ces planches sont d'une beauté saisissante: c'est presque de l'art contemporain. Mention maximum pour le graphisme.

    Question scénario, il faut s'accrocher et là je dois bien avouer que je n'y arrive pas avec toute la bonne volonté du monde. C'est vrai que cela fait toujours bon chic bon genre dans les soirées mondaines de dire qu'on a lu le dernier Bilal. Mais est-ce que quelqu'un comprend véritablement le sens de son œuvre ? Tout est si déstructuré et à la limite loufoque (Pince me). Et ces dialogues mi-philosophiques qui sonnent véritablement creux.

    Sur la préface par exemple, il y a une citation signée par Jean Baudrillard: "L'eau en poudre: il suffit de rajouter de l'eau pour obtenir de l'eau". Ouah, c'est super profond ! Non, pour moi, tout ceci n'est que du pseudo-intellectualisme brouillon. Ce n'est décidément pas le genre de bd que j'aime. Cela restera un univers impénétrable. Or le propre d'un génie est de faire partager. C'est peut-être le cas ici mais à une certaine minorité ou à des lecteurs faisant semblant de comprendre... Ou bien, il faut accepter l'histoire qu'on ne comprend pas pour s'intéresser rien qu'au graphisme. Cela ne me suffit pas en matière de bd. Il y a les musées pour le reste.

    TonicBD Le 29/03/2019 à 15:58:03

    Bilal sans Christin, c'est un scénario quasi inexistant, quelques bonnes idées inexploitées, une philo de bazar. Reste l'atmosphère fascinante. De ce dessin à la facture d'imposteur, émane un magnétisme indéniable.

    Wonderphil Le 04/11/2016 à 03:41:33

    Cette manière qu'a Bilal de décliner les mêmes thèmes à n'en plus finir devient franchement irritant.
    Officiellement le dernier album de Bilal que j'achèterai jamais.

    DamBDfan Le 19/06/2013 à 18:26:49

    Un chef-d'oeuvre de la BD. A la fois poétique, visionnaire et cruelle, on est complètement happé par cette oeuvre d'Enki Bilal. J'ai rarement vu une ambiance aussi glauque et froide de fin du monde sans pour autant tomber dans le malsain. Ici, tout est réalisé avec finesse et intelligence. Le bleu/gris est la couleur prédominante dans ce livre ce qui renforce à merveille son côté suffoquant. On a l'impression d'étouffer au même titre que le/les héros. Un classique.

    Hugui Le 18/02/2012 à 19:10:34

    Comme dit dans la chronique, il ne faut pas chercher à comprendre et se laisser porter dans cette tranche de vie de personnages improbables à la recherche d'on ne sait trop quoi dans un monde tout gris et tout radio-actif et pourtant d'une grande beauté. Il se dégage finalement de la poésie de cette mutation homme animal dans cette eau omniprésente, qui semble la seule manière d'échapper à la violence du monde humain.
    Comme toujours avec Bilal, à ne pas lire dans un moment de déprime, à cette condition on peut rêver avec lui de devenir dauphin pour échapper ce monde de brutes.

    pierre999 Le 06/05/2011 à 22:17:09

    Messieurs MAYAUD et dans une moindre mesure (quoique) GIANATI : quand on ne "chronique" que des BD hyper BOBOS, SNOBINARDES et PSEUDO-INTELLO (j’en passe et des meilleures !!!) et qui, dans même pas 10 ans se retrouveront dans nos poubelles, ON S'ABSTIENT DE CHRONIQUER DES BD TELLES QUE CELLES DE BILAL !!! D'ailleurs, y à pas photo, les chr. de BD, je vais faire simple pour vos petits cerveaux atrophiés dans l’intellectualisme, non, je ne dirai même pas parisien, c’est faire insulte à ces gens, alors je dirais dans une gangue d’argile scellée à la « mode de chez vous », donc les chroniqueurs de BD "normales" (et encore, Bilal pourrait être classé comme intello...) ont des cotes nettement supérieures aux vôtres… CQFD (Que veut dire CQFD ? Pfffft)

    Alors, svp, fermez là, cela vaudra mieux pour tout le monde.

    Je ne vous salue pas !!

    Serai-je édité ?? Courage BDGest, faut accepter les critiques, même indigestes !!
    Je prends copie pour autre site au cas où !! !! !! !
    Allez, çà y est ! Je m'énerve encore au lieu de parler du fond...

    Le fond ? Scénario, dessin, conception, mise en page, mise en couleur....Mamamia ! J'avais de grandes appréhensions en achetant la BD...Mais...Après lecture, je suis resté scotché !!! Du grand BILAL qui a renouvelé son style ! Etait ce possible après ces derniers tomes de Nikopol ?? Et bien oui, et de quelle manière ! Il y aurait eu 50, 100, 150 pages de plus : no problémo, j’aurais dévoré et prolongé mon plaisir…

    excessif Le 18/07/2009 à 08:13:53

    Bilal est l'un des plus grands illustrateurs de notre génération, et son dernier-né, "Animal'z" est un bonheur graphique de tous les instants : une nouvelle technique, de nouvelles textures, de la pure beauté. Mais, même si peu de gens osen le dire, Bilal est un piètre artiste de BD : scénarios incohérents, narration lourde, poncifs pontifiants au service d'une noirceur post-apocalyptique fatiguante... Il fait avouer que les livres de Bilal nous tombent des mains (et je ne parle pas de ses films, simplement atroces !). "Animal'z" ne fonctionne guère que lorsque Bilal abandonne ses épouvantables vélléités philosophiques (oh, les citations des duellistes, une sorte de summum dans la vacuité prétentieuse !) ou ses pénibles obsessions sci-fi (ici, l'osmose humain-animal) : un peu de plagiat de "Massacre à la Tronçonneuse", quelques souffles amoureux entre ses personnages-symboles indifférenciés, un tout petit peu de vie au sein d'une oeuvre imposante mais asphyxiée...

    madlosa Le 13/05/2009 à 23:14:03

    Enki BILAL ne laisse jamais indifférent, ce nouvel opus en est la preuve. Je craignais sincèrement un univers complexe, sombre, voir abscons, pas du tout. Les planches se lisent avec une grande facilité, elle nous ouvre un univers de fin du monde à la beauté magique. Chacun y joue un rôle essentiel et l'on s'attache aux personnages car ils ont leur propre raison d'être. Les hommes et les animaux vivent dans une sorte d'équilibre précaire qui commande la fuite en avant jusqu'à un lieu de passage, le détroit D 17. Encore une fois l'amour triomphe de façon inévitable et... presque naturelle. Les planches sont autant de tableaux sublimes illuminées par la présence de Kim, véritable catalyseur d'énergie et servies par des dialogues parsemées de citations aussi percutantes que drôles. Merci M. BILAL, ANIMAL'Z est une superbe histoire !!!

    guehlynois Le 06/04/2009 à 13:30:11

    Une grosse déception que ce nouveau Bilal. Evidemment on ne parlera pas de la promotion un peu agressive de l'album (proposé en évidence dans les magasins de BD ou à la FNAC)...

    J'ai tout de suite, en tant qu'amateur de Bilal, été agréablement surpris par le dessin et le style graphique même si tout celà reste assez dans le style du Sommeil Du Monstre. Malheureusement j'ai déchanté bien vite. En effet le scénario ne brille pas particulièrement par son originalité (à part le concept plutôt réussi de l'hybridation.) et justement tout le problème est là. Le scénario est vraiment loin d'être à la hauteur du dessin. Les 4 symboliques de l'homme et de l'animal sont bien décrites et développés mais ce pretexte ne nous fait pas oublier qu'il manque cruellement de rythme et d'action à cet univers. Certains éléments restent flous (y a t'il rapport entre Le Coup De Sang et les hybridations ?) et l'aspect parfois politique de la chose peut rebuter nottament avec cette symbolique des balles pour les deux qui s'affrontent, ces constantes références aux nihilistes (ici représentés par des animaux sanguinaires -cf les cannibales-). L'impression que la nature est proche avec ces humains contraints de négocier avec la nature est plutôt agréable, mais le coup du No Man's Land avec peu de ressources est déjà fait 100 fois.

    On retiendra la dimension symbolique surtout de cette bande-dessinée avec l'Homme qui reprend sa place dans la mer, dans la symbiose avec ses origines -Nos cellules sont bien parties de l'eau, non ?- et le fait que finalement l'Eldorado c'est peut-être ça : le retour en symbiose.

    Mais à mon humble avis le scénario aurait vraiment pu être plus travaillé, avec plus de rythme et d'action. Je ne m'attacherais pas à faire une comparaison avec les oeuvres antérieures de ce monsieur puisque ce serait donner lieu à des débats sans fin, mais je dois dire tout de même que je reste sérieusement sur ma faim. Oui c'est du Bilal, mais loin d'être un grand album, même si celà reste bien au-dessus de la plupart des bds qui sortent actuellement.

    Bilal gagnerait je pense à faire de la bande-dessinée sans paroles ni bulles et à se servir uniquement des images pour monter son histoire.

    bentopisch Le 01/04/2009 à 13:45:04

    Des dessins superbes, une technique de couleurs très appropriée à l'histoire.
    Histoire d'après apocalypse où on croise le chemin de plusieurs personnages intéressants, mais trop brièvement. Dommage que ça ne soit qu'un one shot, j'aurais aimé continuer l'aventure, en savoir plus sur ce "coup de sang", sur les personnages et sur ce monde cahotique.