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erlin, avril 1945. Accompagnés de leurs justiciers les plus emblématiques, les alliés s’apprêtent à mettre fin au régime nazi. Douze héros peu connus se retrouvent cependant isolés de cette marche vers la victoire et tombent dans un ultime piège tendu par les SS. Placés en hibernation en vue d’expérimentations futures visant à créer l’Übermensch absolu, ils se retrouvent finalement coupés du monde pendant près de soixante ans. Récupérés par un gouvernement US qui oblige depuis peu les surhumains à agir dans la transparence, en tant qu’agents fédéraux, leur réveil s’annonce brutal !
Un siècle difficile propose la première moitié de cette saga qui compte autant d’épisodes que de héros. Le concept de base de cette mini-série n’est pas sans rappeler Watchmen, le chef-d’œuvre d’Alan Moore et Dave Gibbons. En mettant en scène des justiciers costumés qui reprennent du service dans un monde qui n’est plus le leur, J. Michael Straczynski (Amazing Spider-Man, Rising Stars, Midnight Nation) et Chris Weston (The Filth) placent également un miroir devant des héros américains qui n’en ressortent pas forcément grandis. Le procédé utilisé pour ramener ces sous-fifres du Golden Age dans l'univers post-Civil War de Marvel n’est finalement qu’une version plus moderne du bloc de glace de Captain America et a déjà souvent été exploité depuis.
Mais, malgré cet air de déjà-vu, Twelve s’avère être un récit efficace et parfaitement maîtrisé. A travers le Reporter Fantôme, qui fait office de narrateur principal, le scénariste développe progressivement la psychologie des différents protagonistes. Confrontés à une nouvelle réalité, les douze essayent de trouver un sens à leur vie, tout en tentant d’assimiler les évolutions qu’a connue la société, notamment en ce qui concerne l’augmentation de la pollution et de la violence, ainsi que sur le plan de l’émancipation des femmes et des minorités ethniques. Victimes d’un choc culturel brutal, certains s’accommodent en apparence plus facilement à ce nouvel environnement, alors que d’autres sont complètement déphasés et dans l’incapacité de faire face au passé qui les rattrapent et au futur qu’ils intègrent si difficilement. Outre leur isolement au sein d’un groupe sans véritables racines communes, c’est surtout leur impuissance qui est mise à jour, d'autant plus que tous ne sont pas dotés de super-pouvoirs.
Derrière cette couverture délibérément rétro, le style légèrement désuet de Chris Weston sied parfaitement à ce revival d’anciennes gloires Marvel. Très à l’aise sur les costumes et les personnages assez vieux jeu, le dessinateur livre des planches fort détaillées, mais également d’une grande lisibilité.
En tenant compte de la vague Watchmen qui s’apprête à déferler sur l’Hexagone, le choix de Panini de placer des héros sortis d’un autre âge en vitrine des librairies, alors que la suite de cet excellent récit est encore en stand-by aux Etats-Unis, est peut-être logique … mais sans doute un peu risqué.
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