M
ississippi, années vingt. Un pick-up trace sa route dans un paysage en proie à la désolation et laisse derrière lui un nuage sablonneux. Arrivé à Huzlehurst, semblant de ville fantôme, il dépose un duo inquiétant qui se dirige vers le Plaza hotel. Le réceptionniste, pas plus impressionné que ça, lui-même semble salement siphonné, daigne les renseigner après les avoir superbement ignorés. Ce « noble couple », ainsi nommé par le narrateur, est en ville pour affaires.
La première planche confirme l’impression laissée par la couverture et donne le ton : La ballade de Hambone est un album résolument ancré dans l’étrange. L'utilisation de la carte à gratter, prisée pour jouer sur l’atmosphère (Tardi dans Le démon des glaces, en passant par Andreas et Thomas Ott), est ici maîtrisée à merveille par Leila Marzocchi. Autant la nature apparaît déchainée, autant les éléments d’intérieurs semblent figés. Chaque case regorge de détails insignifiants, agencés avec froideur dans leur solitude. Et pourtant, de ces murs, de ces bibelots, s’exhale comme une indicible présence. Les personnages se fondent naturellement dans l’ambiance quasi-irréelle qui prédomine, les regards sont souvent vides d’expression et la gestuelle a quelque chose de mécanique. La mise en couleur, jouant avec trois tons dominants (rouille, blanchâtre et grisâtre) sur fond noir, renforce cette folie qui hante ce récit à mi-chemin entre roman noir et cinéma fantastique. Enfin, à la hauteur du dessin, l’agencement des planches témoigne d'un travail méticuleux au service du visuel. Dans le même esprit, le scénario d’Igort offre un terreau propice pour que s’exprime le talent de la dessinatrice, mais trouve aussi là ses limites. In fine, la trame devrait laisser perplexe plus d’un lecteur et ne recèle rien de bien extraordinaire en dehors des protagonistes à la personnalité bien fouillée. La voix-off versant de temps à autre dans un descriptif dispensable et des dialogues parfois un peu poussifs ne favorisent pas la fluidité d’ensemble.
La ballade de Hambone porte le décalage d’une histoire correcte, littéralement éclipsée par un graphisme virtuose.
"La ballade de Hambone" nous conduit au fin fond de l'Etat du Mississippi, royaume du Ku Klux Klan dans le milieu des années 20. C'est de la bd purement italienne par des auteurs italiens. Futuropolis l'a faite traduire pour une édition en France. L'oeuvre rend hommage à la musique noire américaine.
Il y a une véritable atmosphère qui rappelle le Sud des Etats-Unis entre le blues, l'humidité ambiante en raison de la proximité du fleuve et les rues désertes de cette bourgade. La narration est parfois un peu pesante mais quelques dialogues font mouche.
Il faut dire également que le trait de ce dessin retranscrit à merveille cette ambiance pesante. La première planche donne le ton sur l'ensemble. On est tout de suite conquis par un très beau travail visuel proche de la gravure. C'est dommage que le récit s'embourbe assez rapidement. Reste le charme du Sud...