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aphaël et son épouse Charlotte coulent des jours paisibles, tout à leur bonheur de vivre les premiers mois d’un heureux événement à venir. Alors, quand le verdict de la première échographie tombe, il a l’effet d’un coup de poing au plexus. Le bébé présente une anomalie, une omphalocèle pour être plus précis... C’est grave docteur ? Seuls des examens complémentaires pourront le dire.
Ça démarre sans prévenir, le bonheur dans toute son innocence que vient foudroyer l’impensable sentence : “mais bon, il y a quand même un problème…”. 46XY est une explosion de douleur que Raphaël Terrier peine à canaliser, à l’image des différents procédés narratifs utilisés, comme autant de possibilités explorées pour expulser son histoire. Après la violence de la première intention qu’il essaie de replacer dans son contexte, il ouvre les vannes du fouillis émotionnel qui s’est emparé de son esprit à compter de cet instant. Une parenthèse traumatique vient d'ébrécher son existence, il n’a pas la prétention de se mettre à la place de celle qu’il aime, c’est tout simplement au-delà de ses moyens. Ensemble, ils vont subir chacun de leur côté la confrontation avec le dérisoire et le déshumanisé. Est-il possible qu’il en soit autrement ?
Il n’est déjà pas évident de mettre des mots sur un drame qui concerne un être humain, alors que dire quand il touche un fœtus ? Cette petite chose dont le statut est déjà loin d’être clairement défini dans nos sociétés, alors dans nos esprits… Cette petite chose qui n’existe pas de manière réelle pour l’entourage, mais avec une telle force pour un couple. Cette petite chose qui parvient à exacerber les sentiments. Dans le bal qui va alors s’initier avec le corps médical, les termes sont choisis, maladroitement d’un côté, et disséqués, laissant s’installer le doute et l’interprétation, de l’autre. Dans un sens, c’est l’impuissance qui prédomine, avec cette sensation d’être balloté par les professionnels, si tant est qu’il soit possible de l’être dans ce domaine. De l’autre, c’est se retrouver face à des choix, des devoirs, pour lesquels aucun être humain n’est prêt. La théorie est une chose, mais quand la réalité vous arrive en pleine gueule, c’en est une autre. La loi instaure des règles, mais quelle est son équité lorsque c’est de votre chair dont elle dispose ?
L’impossibilité de prendre du recul, l’attente des résultats qui indiquent la tendance cyclothymique du moment et se succèdent avec pour seule certitude d’arriver quand il ne faut pas. L’euphorie, si elle est au rendez-vous et toute proportion gardée, est souvent de courte durée, vite rattrapée par la mise en perspective des différentes données. Quand vous vous trouvez dans l’impossibilité d’aider celle que vous aimez, car vous savez que sa souffrance n’est pas que physique. Quand il n’y pas de bonne solution.
Le propos et le dessin sont sans détours, tantôt à vif, tantôt plus posés, ce qui confère une authenticité absolue, et donc une justesse de ton, à ce témoignage. Ce livre n’apporte aucune réponse, parce qu’il n’y en a pas de bonnes et encore moins d’universelles, mais pose des questions qui, elles, revêtent ce caractère universel.
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