73304-23-4153-6-96-8, une suite, sans logique apparente, de nombres et de chiffres alignés sur un petit bout de papier qui ne semble pas avoir de raison rationnelle de se trouver dans une cellule de prison. Voilà sur quoi repose le regard dubitatif de l’homme contre lequel la peine de mort a été prononcée. Il le place dans la sainte Bible qui repose sur sa table de chevet puis s’allonge sur son lit dans une position fœtale pour ce qui doit être sa dernière nuit. Le lendemain matin, alors que le bourreau vient de procéder à l’exécution et que les muscles du condamné se relâchent, la main de ce dernier laisse s’échapper ce petit bout de papier.
Après Cinéma panopticum Thomas Ott renoue avec L’Association pour publier 73304-23-4153-6-96-8. La réalisation est à l’identique du premier, d’une qualité remarquable, avec un soin tout particulier apporté au choix des matériaux pour un résultat superbe qui place ces deux albums dans la catégorie des livres-objets. La technique du travail sur carton à gratter du dessinateur n’a pas changé d’un iota, toujours aussi maîtrisée, et le feuilletage permet de retrouver la sensation de tenir entre les mains un bouquin d’un autre âge. Les cases, dont le pourtour est tracé et le contenu comme griffé au blanc, reposent dans une organisation géométrique quasi-militaire sur des planches d’un fond brillant et littéralement noir. Il s’en dégage une atmosphère aseptisée, froide, propice à installer la peur, sentiment qu'exacerbe un trait décidemment doué pour distiller de l'inquiétant dans le banal.
Seulement, 73304-23-4153-6-96-8 n’est pas Cinéma panopticum. Contrairement à ce dernier où le sens profond sublimait une œuvre basée sur le le sensitif, cette fusion des éléments narratifs est ici absente, et cela au-delà de l’évidence prévisible servie en guise de trame. La connaissance du mode de fonctionnement de Thomas Ott casse-t-elle le suspense sur lequel repose cet ouvrage ? Peu probable. Plus que mal exploitée, l’idée de départ semble surtout moins heureuse. Là où le rythme de Cinéma panopticum avec quatre brèves histoires qui se fondent dans une cinquième était prenant, le long récit, ici initié, se perd dans un axiome qui devient rapidement ingérable, tant il s’impose comme seul maître à bord. Le liant proposé n’est guère satisfaisant et aura tendance à laisser le lecteur sur sa faim. Un rien absurde, passe, mais quel intérêt, si ce n’est narratif, et dans ce domaine, les limites ont été trouvées. L’auteur dépassé par son sujet ? Peut-être, et ce n’est pas d’avoir joué avec le feu de la peine capitale qui apportera un plus quelconque. Sur la fin, le récit se tord douloureusement dans un dénouement tiré par les cheveux. Dommage, car l’imaginaire lié au cinéma d’une époque passée ou à des réalisateurs des plus perturbés est toujours palpable sur certaines scènes ou cadrages.
La déception est à la hauteur de l’attente. Ce n’est pas mauvais à proprement parler, mais 73304-23-4153-6-96-8 manque cruellement d’âme, un peu à l’image de son titre.
J'ai véritablement adoré cette bd muette car elle m'a totalement surpris dans son dénouement. Le sujet concerne une suite de chiffres un peu maléfiques si on est superstitieux.
Il y a d'ailleurs tout un mystère autour de la signification de cette suite de chiffres sur un bout de papier qu'un condamné à la chaise électrique a laissé tomber dans son dernier souffle. C'est le bourreau qui le ramasse et l'histoire peut alors commencer pour notre plus grand plaisir.
Le graphisme en noir et blanc est particulièrement séduisant et colle à merveille pour donner à cette bd un parfum d'ambiance mystérieux. Le silence des cases devient oppressant au fur et à mesure de l'avancée de cette histoire. L'atmosphère est véritablement noire et angoissante.
L'auteur a réussi à délivrer un message autour de ce conte cynique et cruel. Il y a toute une logique véritablement implacable comme les mathématiques. C'est bien pensé et c'est bien réalisé.
Excellent.
Un album sans parole, pas plus de 4 cases par pages, une lisibilité parfaite.
La technique de Ott de gratter des planches noires pour en faire ressortir un dessin en blanc donne une ambiance particulière et très chouette à la fois.
Je me suis laissé embarquer par son style unique, à la fois touffu, chargé et à la fois très clair.
L’histoire est assez simple – comment un papier avec des chiffres en vient à obnubiler un homme qui les retrouve partout dans sa vie.
On se prend, comme lui, à s’étonner, à s’amuser de ces coïncidences. Je me suis totalement mis à sa place et, même si je savais bien que le scénario était écrit jusqu’à la fin, chaque découverte du chiffre provoquait une surprise amusée.
L’ensemble est très bien vu. J’ai peut-être eu un peu plus de mal à la fin pour saisir – rêve ? réalité étrange ? schizophrénie ? – mais j’ai passé un excellent moment avec cet ouvrage.