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Empire USA 1. Tome 1

18/07/2008 9804 visiteurs 6.3/10 (3 notes)

L es Etats-Unis disposent probablement des agences de renseignement les mieux équipées, voire les plus performantes. Elles sont aptes à déjouer les complots menaçant les intérêts américains sur son sol comme ailleurs. Compte tenu des moyens déployés et des succès rencontrés, c’est en tout cas un argument communément admis qui milite en faveur des prises de position de cet Etat puissant qui souhaite apparaître comme le défenseur de la démocratie. Mais supposons qu’en marge de ces succès, un attentat, un seul, terriblement meurtrier, ne soit pas déjoué. Alors à bas les anciens principes, place à des fondements propres à un empire : annulation des élections présidentielles, constitution révisée, libertés réduites, voilà le type de décisions qui sembleraient justifiées pour combattre la menace. L’homme en mesure de déjouer cet attentat s’apprête à mettre fin à ses jours…

Empire USA débarquera courant septembre comme une superproduction Dargaud avec des ambitions de blockbuster et un générique impressionnant dès ce 1er tome. Jugez plutôt : Création des personnages Marini/Reculé – Dialogues Desberg/Yann – Couleurs Burgazzoli/Bautista – Supervision des couleurs Denoulet – Couverture Griffo/Ravon. Un (gros) morceau exécuté à plusieurs mains et en six mouvements qui s'achèvera en décembre 2008.

Le tome 1 ne manque d’ailleurs pas d’ambition en plantant, en introduction, les bases d’une dérive, celle d’un pouvoir politique qui réagit en sortant la masse et le tromblon pour combattre une poignée d’hommes. Que ce soit sur son territoire ou hors de ses frontières, que la réplique génère quelques "dommages collatéraux" dans des pays supposés amis ou non, il ne s’agit pas de s’embarrasser de préceptes moraux superflus. Dans cette première partie d’album, Stephen Desberg montre une nouvelle fois son savoir-faire lorsqu’il s’agit de mettre en scène des organisations gouvernementales, qu’elles aient pignon sur rue ou qu’elles agissent dans l’ombre, pour démontrer leur pouvoir et démonter un fonctionnement toujours prompt à s’affranchir des règles démocratiques. Et ce n’est pas dans les périodes de tension que les rivalités s’apaisent ou que les esprits agissent avec le plus de discernement. Ajoutez un soupçon de scandale lié à des ventes d’armes peu scrupuleuses consenties à des dirigeants de puissances étrangères dont les actes à un moment donné ont rejoint les préoccupations US, et le tableau est complet. Entrée en matière réussie pour peu qu’on soit sensible aux discours plus ou moins alarmistes à propos de la sécurité et du terrorisme, ou des machines étatiques toujours disposées à priver le citoyen de la parcelle de pouvoir qu’il a conquise il y a quelques siècles. Ce qui doit finalement concerner pas mal de monde et asseoir le potentiel de la série.

Passée cette ouverture, qui laisse planer un doute quant à sa réalité dans le récit (hypothèse ? faits avérés ? la suite devrait le révéler définitivement), place au personnage qui a guidé, en voix off, cette découverte : Jared Gail. De sa naissance à son rôle actuel dans le renseignement, en passant par son enfance (serait-il victime d’une malédiction ?), son expérience au sein des forces américaines en Irak et son environnement familial, le portrait est étoffé. Sans compter que son entourage l’est aussi : compagnon d’arme qui déclame son Star wars à longueur de temps, coéquipière obnubilée par un divorce qui se passe mal, intriguante rescapée d’un enlèvement en terre d’Irak. Et on nous promet que la galerie n’est pas achevée. Profitons-en aussi pour tordre le cou à un a priori : même si l’on retrouve une partie des ingrédients émaillant les synopsis de 24, le héros d’Empire USA n’est pas un clone de Jack Bauer, et, au vu de l’état de décrépitude de la référence, il n’y a pas lieu de s’en plaindre. L’action ne manque pas dans cette histoire d’espionnage, mais la pièce se joue plus dans les coulisses qu’en place publique.

D’un point de vue graphique, les habitués du style réaliste façon IR$ et Largo Winch par exemple ne seront pas dépaysés par le travail livré par Griffo. Au point d’être à deux doigts de confondre avec le dernier nommé, le temps de la première planche, en raison des couleurs qui la baignent. Là encore, du travail de pro (si on pouvait se permettre d’en douter).

Si l’on s’en réfère aux jalons posés par cette entrée en matière, Empire USA contient tous les éléments qui devraient en faire l’un des cartons du box-office de la fin de l’année 2008. A noter qu’Alain Mounier (Box - Bamboo, Le décalogue t6 – Glénat) assure le dessin du tome 2 qui sortira en librairie le même jour, le 22 septembre.

Par L. Cirade
Moyenne des chroniqueurs
6.3

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