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andes dessinées érotiques et humoristiques apparues durant la crise de 1929 aux États-Unis, les Tijuana Bibles furent un véritable phénomène de société et un bon moyen pour les Américains d’exorciser leur crainte vis-à-vis d’un monde en crise. Passant de main en main, ces petits fascicules, illégaux mais tolérés, se moquaient de tout et de tout le monde : célébrités du show business, personnalités politiques, héros de comics et groupes sociaux particuliers faisaient les frais de ces satyres. Véritable thérapie collective à la morosité ambiante, leur succès était tel que le simple fait d’y être parodié était considéré à l’époque par ces victimes comme une preuve de leur propre popularité. Véritable mystère aussi, car personne n’a jamais su qui était derrière cette production de millions d’exemplaires : chaîne de solidarité entre les auteurs/lecteurs/vendeurs ou organisation mafieuse ? La discussion reste ouverte. Quoiqu’il en soit, les Tijuana Bibles sont un pan de l’histoire de la BD US en particulier et de la société américaine en général.
Le journaliste Bob Aldeman invite donc le lecteur à découvrir cette partie méconnue de l’histoire des Etats-Unis. Ici point de longs discours, place à l’action ! L’auteur décide délibérément de présenter le plus de matériel possible : au total, c’est plus d’une centaine de ces eight-papers qui se dévoile aux yeux coquins du lecteur. Classée par genre (parodies de comics, célébrités, personnalités politiques, classes sociales particulières, etc.), chaque Tijuana Bible est reproduite sur une page et accompagnée d’un petit texte explicatif introduisant les personnes ou le contexte parodiés. Sur le plan technique, aucune critique n’est à formuler. Malgré l’âge vénérable de la plupart des support originaux (parfois vieux de plus 75 ans), la reproduction est d'une qualité impecable : on a l’impression que ces images viennent d’être dessinées.
Quant aux Tijuna Bibles en elles-mêmes, le côté désuet de certaines pourrait faire sourire mais ce qui frappe le plus, c’est le caractère salace et osé de la majorité d’entre elles : on a vraiment du mal à croire que ces comics ont été écrit et dessinés durant les années 30. Seul bémol : malgré la présence d’un lexique, les allergiques à la langue de Shakespeare regretteront que les textes à l’intérieur des Tijuana Bibles n’aient pas été traduits.
Tijuana Bibles est en fin de compte un ouvrage très intéressant tant le sujet exposé (véritable phénomène de société outre-atlantique) mériterait d’être mieux connu sous nos latitudes. Malgré un prix assez… prohibitif (environ 35 euros), ce livre reste une très bonne idée cadeau si vous devez en offrir un à bédéphile de vos connaissances.
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