A
ppuyé par les Croisés et le basileus, Karlis, le « Live Noir » conduit son armée sur les routes périlleuses de Turquie. Avant d’atteindre Jérusalem, il doit d’abord rallier Antioche et faire tomber les places fortes qui y mènent. Le chemin est long, parsemé d’embûches et sa troupe est constamment la cible d’escarmouches turques. Faim, peur et superstitions sont encore d’autres obstacles qui réclament toute son attention. Mais ce sont surtout Hermance Languedolce, que le doute et le refus de sa propre puissance rendent incontrôlable, ainsi que la superbe princesse des Tafurs, Istvana, avide de pillages, qui occupent son esprit et le tourmentent.
A l’époque des croisades, Thirault narre l’histoire de deux hommes d’exception portés par une violence et une passion mutuelle auquel s’adjoint une foi sans concession dont l’intensité n’a d’égale que la sauvagerie des personnages. Déroulant son récit avec précision, le scénariste écrit une nouvelle page empreinte de démesure et de folie dans la veine du premier volet. Mais si La Milice Sacrée faisait une large place au surnaturel, celui-ci est moins présent dans cette Epreuve de Dieu ou, plutôt, s’intègre-t-il mieux. En revanche, l’amour s’immisce dans la partie, aussi puissant et farouche que les protagonistes. Le triangle amoureux qui s’établit entre le Live Noir, Hermance et Istvana renforce l’intérêt du lecteur en esquissant une rivalité qui pourrait, par la suite, avoir des conséquences importantes.
Combats et massacres déjà présents dans le premier tome sont aussi au rendez-vous de celui-ci, poursuivant la fresque d’un Moyen-Age sanguinaire et excessif. La réalité guerrière est montrée sans fioritures aussi bien dans l’action que durant les attentes qui exacerbe la nervosité des troupes. Cet aspect est très bien transcrit. On sent en effet toute l’urgence de la situation ainsi que la lente montée d’une agitation malsaine due au désœuvrement et à la nervosité. La décadence du campement croisé, les récriminations des hommes comme les doutes se révèlent très crédibles et renforcent la noirceur du propos. Un pic est atteint lorsque survient l’épreuve du feu à laquelle est soumis Hermance. Cette scène cristallise toutes les peurs, toutes les angoisses qui sourdaient avant et dont on avait eu quelques échantillons précédemment. Ces différents aspects sont mis en exergue par le graphisme de Lionel Marty, lequel transmet avec justesse la dimension épique d’album. Son trait semble s’accorder à merveille avec les caractères frustres des personnages dont la rudesse habite les pages. Les décors dantesques joints aux couleurs d’Isabelle Merlet restituent bien l’atmosphère apocalyptique et démente du récit. Ce qui suffit à faire oublier une certaine grossièreté et des approximations dans le dessin, de même qu'une confusion toujours très présente.
Ce deuxième tome confirme la bonne tenue de Rêve de Jérusalem et entraîne un peu plus loin dans une quête extravagante dont l'issue - incertaine - suscite la curiosité mais pas l'enthousiasme.
>>> Lire la chronique du tome 1 de Rêve de Jérusalem
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