I
l couche avec une vieille pour se faire de l’argent de poche et se dégoûte lui-même. Elle pratique l’enjo-kosai avec des barbons peu ragoûtants jusqu’au jour où elle rencontre celui qui l’attire vraiment. Son ex va se marier et il ne peut pas l’oublier bien qu’il soit heureux avec sa copine. Elle croise un ancien amant et l’alchimie opère à nouveau. Il refuse de s’avouer la jalousie qu’il éprouve face au bonheur partagé par la fille qu’il a larguée et un de ses amis. Elle se sent coupable d’avoir piqué le copain de sa camarade et de voir celle-ci sourire malgré son chagrin. L’une est obnubilée par son collègue de travail et s’offre à lui pour qu’il vienne au boulot ; l’autre l’entretient ; lui cherche à souffler et s’émanciper de la trop grande attention de sa chérie en lui étant infidèle.
Explorant le sentiment amoureux, la sexualité – masculine aussi bien que féminine - et l’âme humaine, Kiriko Nananan livre dans Amours blessantes vingt-trois récits très courts de sept ou huit pages qui soulignent les affres du cœur. Le lecteur y retrouve le mode narratif par tranches de Strawberry shortcakes ainsi que le ton intimiste et délicat qui avait conquis dans Blue et Everyday. Utilisant la première personne du singulier, la mangaka met en scène les doutes, envies, espoirs de jeunes hommes et femmes cherchant à vivre le grand amour ou du moins le meilleur possible. Blessures, déconvenues, manques, jalousies se mêlent à la nostalgie et aux souvenirs d’amours perdues qui surgissent avec l’odeur d’un parfum, les retrouvailles d’amants séparés depuis longtemps ou simplement l’envie brusque d’un autre corps que celui qu’on connaît déjà. Les pensées des protagonistes, comme leurs actions, oscillent entre pulsion et raison, à l’image de cette fille qui retrouve son ex-copain, s'offre à lui puis rentre chez elle auprès de son ami du moment. Souvent les personnages s’avèrent désabusés face aux sentiments ou à la vie en couple, mais, quelquefois, pointe une lumière pleine d’espérance, assez rare pour être pleinement appréciée. L’authenticité des situations et des questionnements confère par ailleurs une épaisseur aux nouvelles, estompant ainsi leur traitement un peu trop rapide. Le trait fin et minimaliste de Kiriko Nananan s’accorde bien avec la simplicité naturelle des histoires. Il accompagne avec une élégante sobriété la justesse des tourments et des cicatrices rouvertes, les rendant d’autant plus touchants, voire familiers.
S’il n’a pas la saveur exquise d’un Blue, Amours blessantes montre cependant une nouvelle fois combien Nananan sait peindre avec délicatesse et véracité les atermoiements sentimentaux. Un album à déguster tout doucement pour bien l’apprécier.
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