U
n 30 décembre, dans le vestiaire d’une salle de sport désertée en cette période de fête, Pierre Dragon est contacté par un indic qui le branche sur un trafic de clandestins. L’occasion est trop belle de s’occuper l’esprit et de prendre encore un peu plus ses distances avec les futilités d’un monde auquel il n’entend plus rien depuis bien trop longtemps. Soirée de réveillon, il planque seul sur la dalle du quartier des Olympiades, le Chinatown parisien, quartier hautement déshumanisé quand la nuit s’en empare. Lugubre, mais la piste est bonne.
Déboulant après un Riyad-sur-Seine ancré dans la moiteur de l’été, Bangkok-Belleville s’annonce plus enneigé et plus sombre. Effet lié à la mise en couleur blafarde accompagnant un fond peut-être moins édulcoré et plus palpable par notre société. Comme pour le premier album de la série, l’enquête sert avant tout de décor au ressenti du personnage principal. Le démarrage est époustouflant par ce qu’il parvient à faire passer émotionnellement quant au sentiment de décalage qu’éprouve P. Dragon par rapport à ses contemporains. S’il est maître de sa propre vérité, c’est bien son quotidien dans les marécages de la misère au sens large qui influe sur sa perception des choses. Il ne se sent pour autant pas mieux parmi les siens. La mise en image du final par Frederik Peeters témoigne de ce malaise avec une justesse remarquable, le contraste entre la détresse ambiante et la vulgarité des rires et autres commentaires des collègues de Pierre fait froid dans le dos. Les pensées qui le traversent à cet instant semblent rester en suspens et lui-même paraît parcouru par ce frisson glacial.
Si le duo de scénaristes semble à son aise pour retranscrire les sensations qui ont pris les tripes du flic pendant des années, il l'est moins pour amener les bouffées d’air à un Pierre prisonnier de ses apnées professionnelles. La manière dont est initiée sa relation avec Manuela est maladroite et ne sera pas sans faire écho, chez l’amateur de polar, avec Les orpailleurs de Thierry Jonquet. Cette rencontre prend néanmoins tout son sens au sein du récit, malgré des dialogues parfois empruntés. Dans sa relation à l’autre, P. Dragon excelle, dès lors qu’il retrouve son terrain de prédilection, celui qui ronge son existence. Ainsi, c’est avec un indéniable talent qu’il exprime la difficulté, voire l’impossibilité de communiquer dans un milieu où la sensibilité est considérée comme le propre de ceux qui n’appartiennent pas à la grande maison, comprendre les faibles.
Le titre du dernier acte n'est pas encore tombé, comme pour accentuer une conclusion des plus ouvertes quant à l’évolution du personnage/auteur.
Chronique du T.1 : Riyad-sur-Seine
Avis valant pour les deux albums.
Série trop courte que je noterais 4,5 étoiles si je le pouvais, entre "à lire absolument" et "indispensable".
Les scénarios sont en bétons, efficaces et réalistes.
Et la seconde histoire est meilleure que la première.
Les personnages, même mineurs, sont fouillés et attachants. Ils sont plein d'humanité comme cette hôtesse de l'air thaïlandaise apparaissant sur quelques cases seulement et qui n'aime pas les flics.
F. Peeters sait leur donner de "vraies" gueules expressives et, qualité suprême, reconnaissables. et vu qu'il y a une foultitude de "petits personnages, ce n'est pas plus mal.
J'en arrive donc au dessin. J'adore le trait, le découpage, les couleurs.
Vraiment dommage qu'il n'y ait pas eu le troisième tome annoncé à la fin du second.
Un polar dans la lignée du premier tome, mais meilleur à tous les points de vue. Plus noir (ça parle quand même d'esclavagisme, là où dans le précédent épisode on avait seulement à faire à un trafic de contrefaçons), plus touchant (le héros - Pierre Dragon - fait part de ses états d'âme et de son blues et y apparaît plus vulnérable), plus tragique (le passage entre le flic adjoint et sa mère malade). Plus poétique aussi (grâce au personnage de la juge d'instruction dont Dragon tombe amoureux).
Bref, un polar très prenant qui se lit avec enthousiasme malgré la noirceur de certaines situations. Dommage que le dessin ne soit pas mieux adapté à ce scénario extrêmement bien tourné.
Dans la parfaite ligné du tome 1 en un peu plus fort même. L'avantage d'être en terrain connu et d'être déjà attaché aux personnages...qui le sont d'ailleurs vachement (attachants), parce que finalement proche de nous, malgré ce boulot incroyable (mais pas "jamesbondien" parlant !)...Finalement le seul reproche que l'on peut faire est que la série soit terminé...j'aurais pas dis non à quelques tomes supplémentaires ! Un "must have"...
La grande place laissée aux regards et à certains silences donne au deuxième volet des aventures de Pierre Dragon toute la dimension humaine rencontrée dans le premier volume. Les planches décrivent parfaitement la solitude de Dragon qui saute sur l'occasion d'une affaire de clandestins pour fuire les fêtes de fin d'année. C'est dans cette ambiance assez déprimante de filature, de planque, d'interrogatoires et de conflits avec Bertier, autre flic et abruti exaspérant qu'une lueur s'allume au tournant d'une planche. Elle a pour nom Manuela Laborde et elle est juge d'instruction. A partir de là l'histoire prend une dimension plus poétique, car l'amour s'est invité auprès de Pierre et visiblement, il n'y est pas préparé ! Une tranche de vie, dont le quotidien est très bien décrit, illustrée par des planches qui se dévorent facilement même si le sujet est loin d'être du gâteau !!!
La suite du tome 1 est également très réussie.
On continue de suivre le quotidien de ses flics de l'ombre.
Je ne suis pas un fan du dessin mais par contre je trouve que l'on accroche facilement à l'histoire.
Les flics sont attachants, on les suit dans leur vie de boulot mais aussi dans leur vie personnel avec tout ce que cela peut engendrer (divorce, dépression etc...)
Moi aussi j'ai hâte de voir la suite