Putain d'Usine est l'adaptation en bande dessinée du roman éponyme de Jean-Pierre Levaray, publié en 2002 chez l'Insomniaque. Après un documentaire télévisé, une pièce de théâtre, il était logique que le neuvième art s'y intéresse à son tour. L'auteur y décrit son quotidien d'ouvrier dans une usine pétrolière. Par séquences, il aborde tous les sujets marquants d'un homme qui a passé près de trente ans dans cette entreprise : la pénibilité du travail, les luttes syndicales, les accidents mortels, l'ennui, les corps usés, une vie qui s'écrit plus au passé qu'au futur. Le ton est résolument engagé, totalement subjectif, d'une profonde sincérité. Il s'agit d'un témoignage brut, sans montage, sans censure, sans fioritures, un regard lucide porté sur ces forçats des temps modernes.
Pourquoi choisir la bande dessinée alors que le roman a déjà été décliné au travers d'autres supports ? Sans doute parce qu'elle permet d'allier la force de l'image à la puissance du texte tout en prenant le temps de s'arrêter, de revenir en arrière au besoin, pour en savourer pleinement le contenu.
Putain d'Usine, c'est avant tout la rencontre de deux hommes que rien ne prédisposait à travailler ensemble. Le cliché est beau et peut servir pour la promotion de l'ouvrage, mais à la lecture, il est évident qu'il s'est créé quelque chose entre le scénariste et son dessinateur, une sorte d'osmose sur le sujet. Efix n'était sans doute pas celui que l'on imaginait pour illustrer une telle histoire, plus habitué à croquer des créatures pulpeuses. Après des essais en couleurs, il a choisi le noir et blanc. Le résultat est à la hauteur du texte, il a su retranscrire avec beaucoup de justesse la rude réalité du quotidien de ces hommes. La force de son dessin réside dans cette alternance entre l'encre et le crayon pour croquer les personnages ou les décors. Son style plutôt humoristique apporte la touche d'humanité tranchant ainsi avec ces jeux d'ombres chinoises angoissantes.
Avec un style inimitable, Efix donne une nouvelle dimension à l'histoire par le biais de cet album, celle d'un univers sans pitié pour des hommes livrés en pâture au rythme infernal des machines. Ils voulaient attirer l'attention sur ces ouvriers et leur travail, le contrat est parfaitement rempli. Putain d'album !
Bien qu'il démontre une triste réalité sur le terrain et qu'il peut montrer au grand public la difficulté du travail en usine (pour motiver la jeunesse à pousser un peu plus leur cursus scolaire au delà du bac ?). Je le trouve un peu léger malgré la gravité du propos et surtout qu'il est toujours vrai dans son fonctionnement en 2024, malgré les avancés sociales et technologiques existantes. Un dessin en noir et blanc réussi de Efix, mais qui manque un peu de caractère pour un scénario aussi costaud. Cela ne fait que confirmer ce que je connais déjà du travail à l'usine, je suis content de l'avoir lu, mais on en reste là.
Du noir, du blanc et puis c’est tout. Comme pour mieux illustrer la fadeur du quotidien ouvrier.
Un éternel recommencement au milieu d’une étendue de machines, les âmes sont moroses, à chaque jour sa dose.
En prenant le parti de l’extrême simplicité dans son approche graphique et narrative, la lourdeur d’un quotidien sans saveur devient inexorablement pesante au fil des chapitres.
Résolument engagé, le message est livré brut de pomme. Ici bas, le travail ne rend toujours pas libre, résolument enragé.
Quelquefois, je lis des bd moins légères. Celle-ci a de la consistance, assurément! C'est également triste comme la mort qui rode. On suit le quotidien d'ouvriers dans une grande usine pétrolière.
La pénibilité du travail est un thème rarement évoqué dans la bande dessinée contemporaine. Je conçois ce témoignage poignant comme une oeuvre salutaire. Il faut en effet que le monde sache à quel point c'est frustrant que de travailler comme manoeuvre toute sa vie durant et que ce n'est pas un choix mais une nécessité.
C'est clair qu'il n'y a pas que du bonheur à travailler également dans un bureau avec toute la pression de la hiérarchie. J'ai souvent entendu le discours "si tu n'aimes pas ce que tu fais, tu changes, un point c'est tout!". Très facile à dire surtout quand elle émane de quelques privilégiés qui n'ont jamais connu le chômage ou de problèmes d'argent dans notre société de consommation, qui n'ont vraisemblablement pas de charge de famille à assurer. L'explication donnée par l'auteur au fait qu'on s'enracine dans cette médiocrité est tout à fait réaliste.
La success story est souvent basée sur le facteur "chance". J'ai beaucoup eu de peine également pour celui qui a travaillé pour finir sa vie comme ingénieur, afin qu'il puisse recevoir de la considération. Au moment où il croit qu'il va atteindre ce but, on lui préfère un jeune qui débute. On lui assène un véritable coup de poignard marquant la fin de son rêve et finalement de sa vie.
Les ouvriers ont une espérance de vie réduite. Je ne peux m'empêcher de penser à ma propre maman, ouvrière elle aussi, qui a malheureusement disparu aussi brutalement que les collègues de cet auteur. Ce n'est pas du cinéma : cela arrive réellement. Le travail tue !
Quand bien même vous avez un bac +5 major de promotion, on vous rappelle incontestablement le milieu d'où vous venez et on vous empêche de progresser. Il y aura toujours des cadres tel que ceux décrits dans ce livre pour vous barrer la route et favoriser des personnes de leur caste. C'est un vrai cercle vicieux qui perpétue l'inégalité au sein de notre société.
Alors, oui, j'approuve totalement une bd qui renvoie incontestablement à ma propre histoire familiale. Difficile d'être plus subjectif que moi en cet instant. En lisant cela, j'ai également eu la sensation qu'il y avait finalement des gens qui comprennent ces mécanismes infernaux qui réduisent la capacité des gens à s'en sortir.
Putain d'usine est presque "culte". Même le graphisme en noir et blanc rend l'ensemble encore plus magnifique dans la retranscription de cette triste réalité du monde archi-capitaliste. J'aurais peut-être voulu que les auteurs s'attardent davantage pour expliquer ce qu'était le travail autour de ces machines infernales. On passe beaucoup de temps autour de la machine à café. Cependant, l'auteur a réussi le difficile pari de nous transmettre sa hargne ainsi que sa lassitude. On devrait distribuer cet ouvrage à tous les bobos de la terre !
Plus qu'un témoignage, cet album à vocation documentaire est une oeuvre magistrale décrivant les conditions de travail et de vie de la classe ouvrière. Largement autobiographique, cette bande dessinée rayonne d'émotion grâce à son noir et blanc implaccable et à la justesse des dialogues poignants et toujours sincères. A l'heure de la cyberproduction et du travailler plus pour gagner plus il faut savoir qu'à l'abri des regards médiatiques, vit bel et bien cette classe sociale que semble oublier la classe politique et qu'en 2008 finalement on est encore tout proche de Zola et de germinal !!!
bon, disons le franchement, ce sujet me tient vraiment à coeur (non pas que je sois ouvrier mais j'ai la faiblesse de penser que je sais ce qu'ils peuvent ressentir au boulot) alors j'ai sauté sur cette BD avec une joie non dissimulée... et bien déception ! Je n'ai pas passé le cap des 30 pages...
Je ne parlerai donc pas trop de l'histoire (je serais bien prétentieux de donner un avis en ne lisant qu'un 1/4 de la BD)... Le dessin par contre, je peux en parler... et c'est ce qui m'a fait arrêter la lecture ! Pas que je ne l'apprécie pas, au contraire je le trouve très réussi, mais tout ce noir, ce trop plein de détail dans certaines cases, ... ça m'a vraiment pesé... J'ai été écrasé par le poids des pages...
Donc voilà, je suis déçu...