Y
ann Calec était loin d'imaginer la tournure que prendraient les évènements lorsqu'il a accepté le commandement d'un cargo chargé de fret civil en Indochine. Il réalise bien vite qu'il est l'un des rouages alimentant les deux camps de cette guerre. Modèle de droiture, il va devoir apprendre à faire des compromis et laisser de côté une partie de ses principes. Il ne renonce pas pour autant lorsqu'il s'agit d'en découvrir davantage sur le passé de son père.
Second volet de ce troisième cycle asiatique, La Sale Guerre évite l'écueill des albums de transition souvent peu enthousiasmants peu accrocheurs. Pour ce faire, Jean-Charles Kraehn (Gil St André, Quintett, Le Triangle Secret) a choisi de consacrer une bonne partie de l'album à révéler dans le détail la passé du père de Yann Calec. Cela lui permet d'expliquer le rôle joué par les français dans cette guerre, contraints d'utiliser les mêmes méthodes de terreur que les Vietnamiens pour obtenir le soutien et la collaboration des populations autochtones. Le rôle des cargos chargés de transporter du fret civil et utilisés à des fins militaires est également parfaitement décrit. Le dépaysement pour ces capitaines venus de métropole est total et l'Indochine y est envoûtante et pas uniquement en raison des femmes rencontrées dans les bars.
Kraehn réussit le tour de force d'allier l'Histoire et la fiction, la première ne servant plus uniquement de contexte et de prétexte à la seconde. Il parvient à les imbriquer l'une dans l'autre pour en faire un seul récit d'une grande fluidité et d'une grande cohérence. La Sale Guerre est donc une aventure aussi didactique que divertissante. L'exercice est suffisamment difficile et le résultat mérite d'être souligné.
La série Tramp est reconnue et grandement appréciée par les marins de la marine marchande, en grande partie grâce à cet ancrage dans la réalité et au souci du détail de Patrick Jusseaume. Le premier cyle était un remarquable témoignage de la vie à Rouen et sur les cargos dans les années 50. Ce troisième cycle confirme le talent d'un dessinateur au style épuré, proche de la ligne claire, qui retranscrit avec beaucoup de justesse l'ambiance de l'Indochine. Ses cases sont précises sans être alourdies par un trait surchargé, ses couleurs sont chaleureuses sans effets superflus. Qu'il s'agisse de rizières ou de villages perdus hors des pistes, le dépaysement est total.
Ce troisième cycle asiatique s'annonce comme le meilleur des trois, car il présente une aventure riche, captivante et particulièrement enrichissante. Bien que le premier occupe une place particulière dans l'esprit des lecteurs car il a posé la personnalité de Yann Calec, il n'a pas la force de celui-ci. Tramp s'impose, au fil du temps, comme une série maritime contemporaine d'une rare qualité reposant sur des scénarios abordant sans artifices les questions au centre de l'actualité d'une époque récente.
Chronique du Tome 7
Comme souvent les épisodes intermédiaires entre le tome 1 et 3 sont un ton en dessous. C'est une gageure puisqu'il s'agit de développer l'intrigue sans en dire trop.
Cet album est surtout l'occasion d'une série de flash backs qui sous prétexte de raconter les derniers mois de la vie du père de Yann est l'occasion de raconter cette "sale guerre" d'Indochine. La force du livre tient au fait que les "bons" se comportent en salauds et que les "salauds" peuvent aussi être bons. Bref, pas de manichéisme, mais une réalité dure, changeante et finalement humaine dans son acception la plus basse (chantages, tortures, exécutions,...). A ce titre la dernière image est un bon reflet d'où peut conduire une "sale guerre".
De la bonne bd classique comme je l'aime, un scénario béton ancré dans l'histoire et romanesque à souhait, des dessins à la fois très lisibles et très évocateurs qui créent l'ambiance, on se passionne pour l'histoire de Yann CALEC sur les traces de son père au milieu de la guerre en Indochine, qui doit faire face aux séductions et aux dangers de l'Asie.
Vivement la suite.
Cette sale guerre est un retour en arrière, une plongée dans le passé de Yann à la recherche de son père et de sa congaï Ha Tu. L'ambiance coloniale y est parfaitement rendue et les détails confère à l'épisode une grande solidité historique parfaitement illustrée par les scènes de combat. L'amour est toujours de la partie et la rencontre de Calec avec Souên à l'Arc en ciel donne un élan romantique qui ajoute de la dimension dramatique à la narration. Le scénario et les dessins sont superbes, la partition vraiment réussie, c'est du Super Tramp !