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oirée électorale pour la planète terre. Malcom Foot qui a toutes les chances de remporter ces élections organise une gigantesque fête dans son château en l’attente des résultats. L’atmosphère, à l’image du programme électoral dudit sieur Malcom, est teintée d’un jeunisme ambiant, exacerbé par des invités flashy qui bougent au rythme frénétique des pulsations ininterrompues d’une musique accaparant tout l’espace sonore. Dans cette hystérie collective, où le doute anesthésié par une bonne dose de stupéfiant est pour ainsi dire absent, quelles seront les réactions quand un corps vidé de son sang sera découvert dans les sanitaires. Pour Malcom, tout à son cynisme ou à son inconscience, the show must go on.
Après l’époque des aventures de Flipper le flippé qui restaient ancrées dans le domaine du possible malgré l’usage de figures animales, Morgan Navarro est passé avec Cow-boy moustache dans la création d’univers plus libres, propices à imager sa pensée. S’il poursuit sur ce postulat de base, il revient avec Malcom Foot à un trait simplifié à l’extrême qui convient à l’ambiance déjantée qu’il a souhaitée rendre, l’utilisation des couleurs venant parachever cette sensation.
De quoi parle cet album ? De responsables manipulés comme des marionnettes, plus soucieux de leur image que de leur charge, aveuglés par leur passage au zénith et laissant les navires lentement mais sûrement s’échouer. Mais aussi de la lente dérive d’une société rongée par l’appétit de consommer qui, tout à son petit bonheur, n’est plus en phase avec la réalité. A la masse subjuguée par les slogans qu’elle veut bien entendre, tout aussi irresponsable que ses dirigeants et droguée par une course aux sensations. Mais comme le récit a tendance à abuser avec plus ou moins de succès de symboles et se disperse un peu à force de vouloir brosser un panel le plus large possible de ces déviances contemporaines, il risque par instant de laisser le lecteur interloqué. C’est pourtant le point fort de cet album que cette débauche d’énergie qui émerge à chaque page. L’auteur semble d’ailleurs se délecter à proposer cette sorte de comédie musicale, à grands renforts de chansons aux textes profondément stupides (en anglais il va de soi), accompagnées de chorégraphies qui n’ont rien à envier à certaines émissions du samedi soir. C’est tout aussi paradoxalement que l’humour, puisque c’est le registre retenu pour cet album, manque de percussion et n’atteint pas toujours son objectif. Ce travers était déjà présent dans Cow-boy moustache, comme si Navarro avait du mal à situer son ton entre caricature et pessimisme. C’est d’autant plus dommage qu’il y parvenait fort bien dans le monde plus léger de Flipper.
Si les thèmes abordés ont leur intérêt et sont d’actualité, l’ensemble pâtit toutefois d’un côté trop imagé qui ne fonctionnera pas avec tous les lecteurs. Cependant, l’art de la mise en scène vaut le détour.
- Chronique de : Cow-boy moustache
- Lien vers : Flip
- Lien vers : Flipper le flippé
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