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écidément William a une veine insolente, d’ailleurs à ce niveau, il n’est plus question de hasard et que ce soit grattage, tirage, voire roulette russe à ses heures perdues, le résultat devient vite sans surprise : fais péter la fraîche ou ramasse ta cervelle, c’est selon. Toute la question philosophique qui se pose maintenant à notre héros relève de l’usage d’une telle chance, encore faudrait-il que cela ne lui monte pas à la tête. Ce n'est pas gagné, mise en bouche page 10 : il est le roi de la fête au troquet du coin où il fait virevolter les billets au rythme des tournées. Messe prononcée page 11 : bourré comme un âne et Dieu de la route au volant de sa Porsche, il ne remarque pas sur le bord de la route sa femme qui vient d’apprendre sa grossesse. Cette dernière par contre voit très bien les deux greluches qu’il a fait monter à bord, poésie quand tu nous tiens... Cela avant de s’emplafonner un peu plus loin dans un lampadaire. Bilan : deux mortes. Il va être temps pour l’ami Willy de prendre son courage à deux mains et par là même, le large.
Virée démentielle et improbable, cette bande dessinée alterne d’excellents moments avec quelques longueurs. Si le dessin peut paraître grossier à première vue, il n’en est pas moins parfaitement adapté à l’univers de ce type de récit loufoque dont le but premier est de porter haut les couleurs de la gaudriole. Le trait tout simple de Witko fourmille de détails sur lesquels il est bon de s’attarder pour en saisir toutes les « subtilités » et donne aux visages ces petits riens qui sous-entendent tant. Si l’ensemble a un arrière goût d’improvisation pour ce qui concerne le déroulement général, ce qui n’est pas en soit un défaut absolu, il est ponctué par quelques moments d’anthologie qui réjouiront les amateurs du Professeur furia qui est sans doute le condensé de rigolade le plus percutant du « périodique » Lucha libre . A cet effet, les déboires de la souris de compagnie qui tel Milou n’est jamais bien loin de son maître sont d’une grande délicatesse. Il est juste dommage que le rythme de narration soit inégal, voire un degré en deçà du diptyque Les bijoux de famille et n’ait pas la constance délirante d’un Bouzard au plus haut de sa forme dans Plageman
Pas conçu pour tout le monde, Le gros lot devrait néanmoins trouver son public chez les amateurs d’un certain humour décalé à la française.
Le gros lot est un titre à double sens. Nous avons un personnage assez chanceux qui gagne presque à tous les coups. Il ne compte plus que sur la chance pour s'en sortir. Cependant, le gros lot signifie également sa transformation physique en une personne réellement obèse que sa fiancée finira par quitter pour d'autres raisons d'ailleurs.
L'histoire va alors prendre un tournant assez inattendu où la chance va le quitter. On croise également dans une espèce de vision le fameux Oncle Picsou que tout le monde connaît. Notre héros a également pour compagnon une petite souris qui va vivre également sa propre aventure.
Bref, cela va avoir quelques fois un côté assez farfelu et déjanté. Bizarrement alors que je croyais que le scénario s'était totalement égaré, on va revenir à la fin sur la trame principale. Il y a un côté assez sympathique pour l'ensemble qui ne manque pas de sens et de cohérence finalement. Cette lecture assez iconoclaste et underground est à découvrir.