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epuis qu’il s’est réveillé dans une décharge avec une mallette pleine de billets, Stork est un homme sans passé. Sa rencontre avec Tit, jeune garçon à la recherche d’un oiseau alors que le ciel éternellement gris en est dépourvu, lui offre un but. Tous deux commencent un voyage où l’espoir est rattrapé par l’ombre qui hante la mémoire perdue de Stork : Stalk.
Parallèlement à la sortie tant attendue de la suite de Saiyuki chez Panini, Ki-oon propose au public français de découvrir une autre œuvre de Kazuya Minekura : Stigma, un one-shot tout en couleurs et de belle facture avec ses pages en papier glacé et son format un peu plus grand que la moyenne.
Les dix définitions du mot « stigmate » encadrent l’histoire et chaque chapitre intègre l’une des significations, celles-ci s’interpénétrant les unes les autres tout au long de l’album. Il en ressort plusieurs niveaux de lecture axés aussi bien sur la dimension christique des personnages à travers leurs blessures corporelles que sur leur psychologie tourmentée et leur quête désespérée. Il n’est pas toujours évident de suivre les méandres dans lesquels nous entraîne la mangaka à travers ce drame sombre, teinté de romantisme. Les pensées chaotiques de Stork plongent au plus profond de la complexité des liens entre les hommes, et de la noirceur d’un passé chargé de non-dits qui ne cessent d’affleurer – drogue, sexe, mort, violence. Les rapports presques filiaux entre Tit et Stork en paraissent d'autant plus lumineux et chargés d'espérance.
Côté graphisme, les personnages rappellent énormément ceux de Saiyuki et la patte de l’artiste est immédiatement reconnaissable avec son goût pour les yeux tombants, les visages et les attitudes de beaux – et même un rien mauvais - garçons. Dans des décors réduits à la portion congrue, voire inexistants, les protagonistes ressortent avec force grâce aux couleurs très réussies et aux cadrages presque cinématographiques.
Stigma est un album qui se distingue des productions habituelles. Les divers niveaux de compréhension de son intrigue, son fort symbolisme, ses dessins et son édition de qualité demandent qu'on s'y attarde ; le plaisir est au rendez-vous.
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